Repères - N°48 / Février 2021 - Le magazine de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire - 7

JAPON 2021

Mesure de la radioactivité d'un stockage
de terre contaminée avec un outil open data.

Des effets radio-induits ?

« Cancers du sein, de la thyroïde, leucémies...
seront difficilement imputables aux retombées radioactives, car les doses moyennes
maximales étaient trop faibles, de l'ordre de
quelques millisieverts. » C'est en ces termes
que Klervi Leuraud, spécialiste du risque
radio-induit, résume le consensus des épidémiologistes.
Des effets sanitaires indirects sont indéniables : diabète, dysfonctions rénales ou
hépatiques, obésité, alcoolisme... Sont mis
en cause la perturbation des soins et le stress
post-traumatique. Ce stress s'atténue : entre
2012 et 2014, sa prévalence a baissé de 19 %
chez les hommes et de 27 % chez les femmes3.
n

Quatre habitants sur cinq
ne sont pas revenus

Le retour de la population s'engage à partir
du 1er avril 2014. Il est lent et partiel. Début
2020, le taux de retour moyen est inférieur à
20 % dans l'ensemble des communes ayant
fait l'objet d'un ordre d'évacuation, variant
de 2 % à 75 %.

En 2016, les personnes déplacées dans la municipalité
de Miharu, préfecture de Fukushima, vivent encore
dans des logements provisoires. Elles sont majoritairement âgées,
beaucoup de jeunes ayant quitté la région définitivement.

Chantier de décontamination d'une route
dans la préfecture de Fukushima en octobre 2016.

L'importance des « facilitateurs »

2011, pour rassurer la population, les seuils
de contamination des denrées alimentaires
sont abaissés. Mais, aux yeux de certains
consommateurs, le seuil vaut preuve de
contamination.
L'expérience japonaise pointe l'importance
des « facilitateurs ». Les enseignants, le personnel médical ou administratif constituent
un relais entre les citoyens et les autorités.
n

Le casse-tête des eaux
contaminées

En novembre 2020, le site de la centrale
abrite 1 234 000 m3 d'eau tritiée, soit 1 040
réservoirs. Cette eau radioactive provient
de dix ans de refroidissement des réacteurs
endommagés. Selon Tepco, la limite de
1 370 000 m3 sera atteinte en 2022.
En 2016, les experts japonais envisagent
différentes options. Deux d'entre elles sont
encore en discussion avec les diverses
parties prenantes : le rejet en mer (favorisant sa dilution) ou dans l'atmosphère
(vapeur). Leurs avantages et les inconvénients - techniques, radiologiques, sociologiques... - sont étudiés.
Selon les autorités japonaises, l'impact d'un
rejet en mer sur les populations et l'environnement serait comparable à celui des installations nucléaires en fonctionnement. n
1. L'Agence nationale pour la gestion des déchets
radioactifs.

2. Intensive Contamination Survey Area.
3. Étude Fukushima Health Management Survey.
Pour en savoir plus :

Ministère de l'Environnement, Japon
josen.env.go.jp/en/
L'Initiative de dialogues à Fukushima
irsn.fr/kotoba-FR

Près de 170 m3 d'eau tritiée
sont générés chaque jour.

« La mesure rend visible la radioactivité. »
Jean-François Lecomte, expert en radioprotection, retient cette leçon des « dialogues à Fukushima », un projet qui donne
la parole aux Japonais concernés depuis
2011, soutenu par l'IRSN.
Des initiatives citoyennes pour compléter les
mesures officielles émergent. Un fermier
de Suetsugi relève la radioactivité dans
ses champs, des associations s'équipent
pour effectuer des mesures, des résidents
réclament des dosimètres individuels. Des
échanges avec des experts aident à comprendre ensemble la situation. C'est ainsi
que naît la co-expertise.
Autre leçon : « La norme ne suffit pas. Elle
peut même avoir des effets pervers. » Dès
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D'autres solutions sont à l'étude pour le
recyclage des lieux ou stockages en dehors
de la préfecture de Fukushima. Les dernières
kariokiba seront vidées fin 2021.
La décontamination est désormais terminée dans la zone surveillée (ICSA2). Elle
comprend la zone spéciale de décontamination et les communes pour lesquelles il
était estimé que la dose annuelle pouvait
être comprise entre 1 et 20 mSv.
« Plusieurs années seront encore nécessaires
pour gérer ces déchets, ce qui implique un coût
économique considérable », conclut Jérôme
Guillevic, expert en radioprotection.

http://josen.env.go.jp/en/ https://www.irsn.fr/EN/Kotoba-EN/Pages/Kotoba-EN_Introduction.aspx

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