Aires Marines Protégées n°50 le marin du 26 novembre 2020 - 2

La posidonie sous haute surveillance
La protection des herbiers de posidonies
entre dans une nouvelle phase
en Méditerranée avec une évolution
de la réglementation.

« Nous bénéﬁcions d'un dispositif de surveillance en
temps réel. » Pierre Boissery, expert à l'agence de
l'eau Rhône Méditerranée Corse, se réjouit de pouvoir suivre les navires sur les herbiers de posidonies.
Un suivi rendu possible par l'agrégation des données
AIS et de celles de Donia. Cette application permet
aux plaisanciers de connaître la nature des fonds et
la réglementation.

Secteurs à surveiller
En 2020, la présence de navires sur les herbiers
a augmenté de 15 % pendant l'été par rapport à
2019. Plus de 7 000 mouillages y ont été dénombrés. « Il faut non seulement comptabiliser les
navires au mouillage, mais également leur durée,
indique Pierre Boissery. Un navire est par exemple
resté ancré 40 jours sur l'herbier. On arrive ainsi à
plusieurs années de temps cumulé dans ces zones
d'espèces protégées. » Ces chiﬀres permettent de
représenter sur une carte les zones où les pressions sont les plus importantes. Les golfes de
Saint-Tropez et Juan et le secteur de Menton sont
des secteurs à surveiller particulièrement en raison de la présence de navires de grande plaisance
(supérieurs à 25 mètres). Les ancres arrachent de
façon irréversible les racines de posidonies, qui forment un habitat clef pour toute la Méditerranée.
Ces herbiers abritent 25 % des espèces animales
observées.
« Jusqu'à présent, il n'était écrit nulle part qu'on ne
pouvait pas mouiller sur l'herbier, même s'il est interdit de le détruire, souligne Stéphane Péron, chef
du pôle aménagement durable de l'espace marin à

Le mouillage a de multiples impacts sur la posidonie : l'impact direct au moment du mouillage, le raguage
ou déplacement de la chaîne, la remontée de l'ancre qui arrache les rhizomes.

la préfecture maritime Méditerranée. Aujourd'hui,
nous faisons le lien entre l'ancrage des plus grands
navires et la destruction de l'herbier de posidonies. »
Un arrêté a été pris en juin 2019 prévoyant le principe général d'interdiction de mouillage sur la posidonie, espèce protégée depuis 1988. Les arrêtés
d'application, qui seront pris d'ici la ﬁn de l'année,
préciseront les zones interdites au mouillage des
navires de 20 ou 24 mètres et plus.
Avec l'appui de l'OFB et les résultats des suivis de
l'herbier réalisés par l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse, des concertations locales ont été
menées par les diﬀérentes directions départementales des territoires et de la mer. Ces réunions ont

Renforcer la coopération en Méditerranée

3 questions à...

Quels sont les objectifs du Mediterranean posidonia network ?

Frédéric Villers,
référent mouillage en
Méditerranée pour l'OFB

permis de délimiter précisément ces zones d'interdiction.
Au-delà de la protection de l'environnement, ces
arrêtés permettront d'assurer la sécurité maritime en
évitant une concentration trop forte des navires dans
certaines zones du littoral. « Nous essayons d'être
le plus précis possible en fonction des secteurs. Il est
certain que dans le Var et les Alpes-Maritimes, où l'on
constate à la fois une forte fréquentation et une forte
présence de l'herbier, nous sommes particulièrement
attentifs et délimitons les zones le plus précisément
possible », aﬃrme Stéphane Péron. Quinze arrêtés
préfectoraux seront publiés d'ici à la ﬁn 2020, de la
frontière italienne à l'Hérault, en passant par la Corse.

Nous souhaitons renforcer la coopération à l'échelle de la Méditerranée,
où la conservation de l'herbier
de posidonies est un des enjeux
majeurs. C'est un écosystème clé.
Aujourd'hui, une des plus grandes
menaces est celle des ancrages des
navires, et notamment des plus
grosses unités. En France, la protection des herbiers de posidonies est
en train de se renforcer au niveau
réglementaire. Il faut éviter un eﬀet
report de l'impact vers d'autres pays
où la réglementation est moins

l'aire marine / numéro 50 / novembre 2020

contraignante car ces navires se
déplacent rapidement.

Commission européenne. C'est audelà de nos espérances.

Comment est né ce réseau et qui
rassemble- t-il ?

Quelles en seront les actions ?

Le réseau est né sous l'impulsion de
l'Oﬃce français de la biodiversité à
l'issue d'un colloque européen sur
l'impact des ancrages. Nous avons
noué un contact avec nos collègues
italiens, espagnols, grecs et croates.
Nous avons inclus l'ensemble des
pays de la rive Méditerranée. Le
Maghreb est également concerné.
La première réunion virtuelle, début
octobre, a rassemblé onze pays et la

Nous mènerons une étude pour
connaître la réglementation et le
niveau de protection de l'herbier de
posidonies dans chaque pays. Nous
devrons aussi élargir la connaissance
et établir une carte des secteurs
prioritaires. Enﬁn, l'enjeu fondamental est celui de la communication, en
prenant appui sur les retours d'expérience d'autres pays. Nous espérons
développer un outil dès 2021, une
vidéo en plusieurs langues.

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