Aires Marines Protégées - n57 le 1 septembre 2022 - 2

AMP : un outil pour gérer la pression pêche
Les différentes aires marines
protégées (AMP) ont en
commun l'objectif de protéger
les habitats et les espèces. Réduire
les pressions des activités
sur les écosystèmes est une priorité.
La pêche professionnelle peut engendrer des pressions
très importantes sur le milieu, en particulier les activités
de chalutage de fond qui peuvent avoir une action
d'abrasion des fonds marins, de mise en suspension
des sédiments ou de destruction des habitats. « Les
analyses risque pêche (ARP) nous permettent de comprendre
les pressions dans les zones Natura 2000. La
France s'est engagée à réaliser toutes les ARP, sur le
milieu, mais aussi sur les espèces d'intérêt communautaire
d'ici 2026. Les mesures de gestion qui en
découlent doivent être prises d'ici 2027 », précise Stéphanie
Tachoires, chargée de mission pêche et usages
maritimes à l'OFB. Quelques sites ont déjà adopté de
nouvelles mesures. « En baie de Seine occidentale, les
dérogations de chalutage dans la zone des 3 milles ont
été revues et, pour protéger les fonds, la drague a été
interdite sur certains secteurs de maerl ou d'herbiers
par les comités des pêches. »
Une gestion
efficace
D'autres types d'actions ont vu le jour. Le site Solupeche
(1) permet de partager avec tous les pêcheurs
les solutions techniques pour réduire leurs impacts.
« L'objectif est de s'assurer que le milieu soit résilient
en mettant des seuils et des limites, indique Martial
Laurans, chercheur à l'Ifremer. Les parcs naturels
marins permettent cette gestion. Une veille sur l'état
des écosystèmes est réalisée, ce qui permet de distinguer
ce qui est engendré par une pression de pêche
et par les changements dans les conditions de l'environnement.
»
De la connaissance à la réglementation : 10 ans de gestion pour une exploitation durable du champ d'algues
dans le parc naturel marin d'Iroise.
Les parcs, grâce à leur conseil de gestion qui rassemble
tous les acteurs, permettent une gestion
efficace. « On discute des objectifs de conservation.
Pour la langouste rouge, dans le parc naturel
marin d'Iroise, ce sont les pêcheurs qui ont proposé
une zone d'interdiction de pêche qui a été validée
par le conseil. » Cela a abouti à la fermeture de la
pêche pendant trois mois, à l'interdiction de pêche
des femelles grainées, ce qui a permis de passer
de 15 tonnes de langoustes débarquées en 2007 à
100 tonnes en 2021. Ces règles, prises au niveau local
ont été depuis adoptées au niveau national. « Il
faut qu'on soit capable de vivre ensemble, en interdépendance
avec la biodiversité des poissons, oiseaux
et mammifères marins », assure Armand Quentel,
président de la commission environnement et
usage maritime au Comité national des pêches. Récemment,
les pêcheurs se sont impliqués dans une
étude sur le puffin des Baléares, espèce particulièrement
menacée. « Cet oiseau fait un lien avec toute la
communauté maritime, de l'Espagne jusqu'en Angleterre.
C'est une porte d'entrée pour se rapprocher de
l'ensemble des acteurs et sensibiliser sur la nécessité
absolue d'évaluer les effets de nos activités sur ce qui
nous entoure en mer. L'étude sociologique à laquelle
nous avons participé est un début extrêmement prometteur
qui peut faire évoluer les comportements. »
(1) www.solupeche.fr développé par l'OFB avec le Comité
national des pêches maritimes et des élevages marins.
3 questions à...
Une abondance d'espèces patrimoniales
Dans quelles conditions, la pêche
professionnelle est-elle autorisée
dans la réserve ?
Fréderic Cadène
Conservateur de la
réserve naturelle nationale
de Cerbère-Banyuls
La pêche professionnelle reste
possible mais réglementée dans
l'intérêt de la réserve. Dix pêcheurs
« petits métiers » peuvent pratiquer
leur activité à bord d'une
embarcation qui ne doit pas excéder
10 mètres. Ils doivent utiliser au
maximum trois filets maillants de
750 mètres. Les palangres, casiers,
pots à poulpes et la pêche aux
oursins sont interdits.
l ' a i r e m a r i n e / n u m é r o 5 7 / s e p t e m b r e 2 0 2 2
Quel est le bilan de cette gestion ?
Nous constatons une abondance
d'espèces patrimoniales même en
dehors de la zone de protection
renforcée. Ce qui démontre que la
pression de l'activité sur la biodiversité
remarquable est réduite. Sur avis
du conseil scientifique, la réglementation
peut évoluer si des enjeux
de conservation l'exigent et cela en
concertation avec l'ensemble des
usagers et après validation du comité
consultatif de la réserve marine qui
compte 35 membres.
Pourquoi un projet d'extension ?
Créée en 1974, la réserve marine a
démontré son efficacité. Ce projet
d'extension aura comme objectifs
d'augmenter la préservation des
milieux sur la côte rocheuse, d'améliorer
le partage de l'espace entre
les usagers, pour permettre une meilleure
adéquation entre préservation
et pression des usages et d'atteindre
une réduction des pressions sur ce
territoire qui deviendra plus que
jamais le cœur du parc naturel marin
du golfe du Lion.
Lionel Pedraza / Hans Lucas
Yves Gladu / Office français de la biodiversité

http://www.solupeche.fr

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