Produits de la mer - n°166 - octobre 2016 - 45

Dossier ❘ CRUSTACÉS DE LUXE

Le crabe des neiges,
nouvel eldorado de la mer de Barents
Après le king crab, la Norvège entend s'imposer
comme un fournisseur clé pour le crabe des neiges.
Et pour dégager plus de valeur ajoutée, le pays mise
sur une commercialisation en vivant.

Évolution de l'approvisionnement
mondial en crabe des neiges (Chionoecetes opilio)
160 000

Barents Sea
catch estimates
Greenland

140 000
120 000
100 000

Russia Pacific

8 0000
6 0000

Alaska

4 0000

Canada GSL

2 0000
0
(en tonnes)

2013

2014

2015

Canada NF

C.A

igration naturelle ou introduction par des eaux de ballast ? La
question reste posée. Toujours
est-il que le crabe des neiges
(Chionoecetes opilio)
opilio),, jusqu'ici présent dans
le détroit de Béring et sur les côtes est du
Canada et ouest du Groenland, prolifère
désormais en mer de Barents. Détecté
pour la première fois en 1996, il a vu sa
population exploser en 2012. Une invasion
dont la Norvège et la Russie se félicitent
du fait de l'énorme potentiel commercial que représente l'espèce : son marché
est mondial et ses prix rémunérateurs. En
2015, ils avoisinaient à l'export les 60 NOK
soit 6,46 €/kg.
Les prévisions de captures annuelles
pour l'espèce en mer de Barents oscillent
entre 25 000 et 75 000 tonnes sur les dix
prochaines années, voire plus si les stocks
continuent de croître. Ces derniers y sont
déjà dix fois plus importants que ceux du
crabe royal. Et les Norvégiens entendent
bien en faire une activité aussi profitable.
Aujourd'hui, selon Nofima, Norwegian
Institute of Food, Fisheries and Aquaculture,
jusqu'à 70 % des crabes royaux capturés
par les Norvégiens sont débarqués vivants
et vendus à des prix bien supérieurs à du
congelé. L'institut tente aujourd'hui d'adapter ses recherches au crabe des neiges, proposé à 80 % cuit et congelé bord, pour lui
permettre de survivre en viviers.

L'enjeu est d'importance puisque les
débarquements montent en puissance.
En équivalent entier, ils étaient estimés
à 9 800 tonnes en 2015 côté norvégien,
contre 175 tonnes en 2012. Côté russe, les
débarquements ont atteint 8 800 tonnes,
soit deux fois plus qu'en 2014, première
année d'ouverture de la pêcherie.
À défaut d'être mature sur l'espèce, l'expédition en vivant a débuté. En 2015, la
Norvège en a exporté une centaine de
tonnes aux États-Unis et une vingtaine de
tonnes au Japon, les deux plus gros importateurs de crabe des neiges ; la demande
européenne restant marginale.
Pour les Canadiens, grands pourvoyeurs
d'opilio,
d'
opilio, cela s'explique. « La demande des
Européens est faible car le produit, qui n'est
pas pêché sur les côtes comme c'est les cas
aux États-Unis, est méconnu du consommateur »,, confie Sandrine Étienne, responmateur »
sable des ventes pour la France d'Ocean

Les prévisions
de captures
Entre 25 000 et
75 000 t d'ici dix ans
dans la mer de Barents.

Choice International, premier producteur canadien de crabe des neiges. De
plus, celui-ci n'est pas si facile à préparer, la taille des sections requiert une certaine expertise en cuisine. Des volumes
marginaux de pinces cocktail ou de chair
décortiquées en Chine arrivent en Europe
pour répondre aux besoins de la restauration asiatique. Enfin, la fermeté de la
demande dans d'autres pays a fait grimper les cours du crabe des neiges. Le prix
de sa chair a grimpé de 30 % en cinq ans
pour atteindre les 32 €/kg en 2015. Dès
lors, « les importateurs européens se sont
reportés sur la chair de crabe des neiges
de Corée ((Chionoecetes
Chionoecetes japonicus
japonicus),, une
autre espèce plus abordable
abordable »»,, commente
Sandrine Étienne. Alors, les sections
crues ou cuites produites dans les trois
usines de Terre-Neuve d'Ocean Choice
International se destinent avant tout aux
États-Unis et au Japon. ■

Des prix à la hausse en 2016
utre le Canada, l'Alaska est un pourvoyeur important de Chionoecetes opilio. La baisse de
ses quotas de 40 % sur l'espèce en 2016 devrait donc tirer les prix à la hausse, d'autant
que les stocks 2015 sont épuisés. Alors, même si ceux de l'espèce cousine, le Chionoecetes
bairdi, ont été augmentés, les experts estiment que les prix devraient être orientés à la
hausse. De fait, les importateurs japonais cherchent, en dépit de la baisse du yen, à sécuriser leurs approvisionnements en Alaska et au Canada pour faire face à la baisse en Russie.

PRODUITS DE LA MER N°166 OCTOBRE 2016

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