produits de la mer - n°187 - Novembre 2018 - 32

Dossier ❘ NORVÈGE

À la poursuite de l'or

rose

Encore plus de saumon et
à des prix rémunérateurs,
les salmoniculteurs
vivent des années fastes.
Les temps sont plus difficiles
pour les exportateurs dont
les marges sont à la peine.

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PRODUITS DE LA MER N°187 NOVEMBRE 2018

Lionel Flageul

ne pépite, le saumon ? Pour la
centaine de producteurs norvégiens, certainement ! En particulier pour la vingtaine qui réalise 80 % de la production de salmonidés,
menée par le trio de tête Marine Harvest,
SalMar et Lerøy Seafood. Selon le cabinet
d'analyse économique Ernst & Young (EY),
l'industrie du saumon au sens large (1) a
triplé sa rentabilité sur la dernière décennie. Grâce à des prix très rémunérateurs qui
ont dopé le taux de marge d'exploitation
(ebitda margin en anglais). Une analyse
plus fine de la filière montre que ce sont les
éleveurs qui dégagent le meilleur excédent
brut d'exploitation (équivalent de l'ebitda
anglosaxon) tant au niveau des écloseries,
de la production de smolts que des fermes
en mer. Le transport par wellboat du saumon vivant jusqu'aux stations d'abattage
s'avère aussi très rentable, plus que les
autres services (santé animale, biotechnologies...) ou la fabrication d'aliments.
La hausse tendancielle des cours du salar
plombe en revanche la rentabilité des entreprises de négoce international. Le cabinet
EY souligne pour la première fois en 2017
un taux de marge d'exploitation négatif.
Pour une activité dégageant des marges
d'1 à 2 %, qui a des difficultés à répercuter les hausses sur les marchés cibles, en
particulier en Pologne et en France, il est
impératif de faire des volumes. « Et d'offrir un vrai service. Nous sommes l'interface entre les fermes et les clients étrangers. À nous d'apporter des informations
fiables sur les disponibilités et les qualités
à l'acheteur : taux de gras, couleur, longueur, calibre. Par exemple, si l'abattage
intervient rapidement après un traitement
contre les poux, le poisson sera plus fragile.
L'éleveur, lui, attend qu'on vende toutes
les tailles au meilleur prix. Enfin, c'est l'ex-

portateur qui gère toute la logistique en
fonction des plans d'expédition des unités
d'abattage. Un camion de saumon pèse
au moins 110 000 euros ! Le risque est
pour nous en cas de problème », explique
Johan Kvalheim, un des quatre cofondateurs de Star Seafood. De création récente,
cette société de trading basée à Bergen et
à Måløy travaille principalement avec des
fermes familiales indépendantes ou sociétaires de petite et moyenne taille, plus occasionnellement avec des groupes intégrés.
Ils sont une petite vingtaine d'exportateurs norvégiens à se partager quelque
30 % de la mise en marché. L'essentiel
de l'offre passe entre les mains de cinq
exportateurs, dont quatre affiliés aux premiers poids lourds du saumon : Marine
Harvest Markets Norway est une filiale à
100 % du groupe, Leroy Seafood, SalMar
et Ocean Quality qui est l'entité commerciale de Grieg Seafood et de Bremnes
Seashore. Cinquième compagnie d'exportation avec 90 000 tonnes de poisson dont
65 000 tonnes de saumon, Coast a une
position médiane. Ce groupe a consolidé
des partenariats étroits en amont. Il fédère
les ventes d'une cinquantaine de fermes en
plus de sa propre production via une participation chez un éleveur. Coast a également

Une mine
d'informations
www.barentswatch.no
Identifier en un clic
la photographie,
globale ou par site,
de la production de
saumon : licences, état
sanitaire, traitement
contre les poux,
activité des wellboats,
c'est libre d'accès
sur ce site officiel
norvégien actualisé en
permanence.
Notez, le site donne
aussi des informations
sur l'activité de pêche.

des parts chez le transformateur Sotra et il
traite en prestation avec une trentaine de
stations d'abattage. « L'entreprise commercialise la production de petits producteurs établis du nord au sud-ouest du pays
sur la base d'engagements à l'année. Un
grand puzzle qu'il faut réguler, organiser,
regrouper », souligne François Perrone,
directeur export en Europe chez Coast.
Pas facile, le métier d'exportateur de
saumon. La concurrence est d'autant plus
rude que la visibilité sur les cours est faible.
La volatilité des prix spot est telle qu'en
15 jours, le saumon peut grimper d'un
euro. Ce qui gêne les opérateurs ayant
des contrats à terme à honorer à un prix
inférieur. Ils devront alors renflouer la différence à l'acheteur. « L'exportateur norvégien est entre le marteau et l'enclume,
résume Sébastien Roussel, directeur de
Direct Océan, importateur français de saumon. Personne ne maîtrise les cours, même
les acteurs les plus importants. Un Marine
Harvest peut, certes, influencer le marché
par ses disponibilités mais il n'est pas le
seul. » Et la nature a aussi son mot à dire.
(1) En comptant les éleveurs, leurs fournisseurs
d'intrants, d'équipements, de services,
les abattoirs et les exportateurs

http://www.barentswatch.no

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