produits de la mer - n°201 - Juin-juillet 2020 - 48

Dossier ❘ ÉTATS-UNIS/CANADA

Le Ceta
rebat les cartes concurrentielles
Les exportations
canadiennes de homard
et de Saint-Jacques
vers l'Union européenne
profitent de la suppression
des droits de douane.
Les volumes sont
en hausse, au grand dam
des opérateurs américains.

n vigueur depuis l'automne 2017,
le Ceta, l'accord de libre-échange
entre le Canada et l'Union européenne, impacte les importations nord-américaines de homards et de
Saint-Jacques. Les droits de douane appliqués sur les produits canadiens sont tombés de 8 % à 0, sur les Saint-Jacques et sur
le homard vivant, congelé et les queues. Il
subsiste, sur la chair préparée ou conservée, un droit résiduel de 3,33 %, qui sera
supprimé au 1er janvier. L'impact se ressent
sur les échanges de l'UE avec les deux pays,
car entre les deux espèces, il existe une vraie
rivalité commerciale entre les deux voisins.
« Le Ceta a clairement eu un effet
négatif sur nos exportations à destination de l'Union européenne. Il représente
pour nous un handicap concurrentiel »,
considère Colleen Coyne, coordinatrice
produits de la mer pour le Nord-Est au
sein de Food Export USA, l'agence de

Le boîtage recyclable en carton
(ici celui de Seafoodia) :
une alternative à l'historique
format en sachet
plastique avec glace.

promotion des produits alimentaires américains. Des propos confirmés par les statistiques de la NOAA, l'agence fédérale
des pêcheries. Entre 2018 et 2019, les
exportations américaines à destination de
l'Hexagone se sont repliées de 14 % sur
la Saint-Jacques surgelée, de 30 % sur le
homard vivant. Sur la chair de homard, la
baisse atteint même 47 %. Face à cette
nouvelle donne, les opérateurs américains
renforcent les messages autour de la qualité et des atouts spécifiques des produits
américains. Ils affichent aussi leur volonté
de prospecter de nouveaux marchés,
notamment en Chine (lire ci-dessous).

%
La progression
des exportations
de homards vivants
canadiens vers
la France entre 2018
et 2019 (source,
ministère canadien).

Le homard US retrouve la Chine

our les exportateurs américains de homards, la réouverture du gigantesque marché chinois
après la crise du Covid-19 coïncide avec un abaissement bienvenu des droits de douane, de
10 à 5 %. La mesure fait suite à l'accord trouvé début 2020 entre Pékin et Washington. La guerre
commerciale qui faisait rage entre les deux pays depuis 2018 avait eu pour effet de renchérir de
plus de 30 % le homard du Maine par rapport à son concurrent canadien. Globalement, jusqu'à
300 millions de dollars d'exportations américaines de fruits de mer pourraient être exemptés
dans le courant de l'année. L'accord n'est pas sans conséquences pour les Canadiens, qui avaient
su tirer profit des barrières imposées à leur principal concurrent.

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PRODUITS DE LA MER N°201 JUIN-JUILLET 2020

Côté canadien, on se félicite du coup
de pouce que constitue la suppression des
tarifs douaniers. Pour autant, sur les SaintJacques, l'effet n'a pas été immédiat.
« L'année qui a suivi l'entrée en vigueur
de l'accord, nos exportations ont même
baissé », se souvient Yannick Dheilly, délégué commercial à l'ambassade du Canada
en France. En 2019, en revanche, aucune
équivoque : plus de 1 700 tonnes de SaintJacques surgelées ont été exportées vers
l'Hexagone. Soit 600 tonnes de plus qu'en
2018, faisant du pays de l'érable le troisième fournisseur français. En valeur, avec
324 millions d'euros, le Canada est désormais au coude-à-coude avec l'Argentine (328 millions). Sur le homard, l'analyse des chiffres est plus compliquée : les
données export du ministère canadien de
l'Agriculture sont inférieures à celles des
importations publiées par FranceAgriMer.
La raison des écarts tient au fait qu'une
partie de la marchandise commercialisée
en France a transité par la Belgique ou les
Pays-Bas. Plus globalement, les statistiques
sont aussi biaisées par le fait que des produits pêchés aux États-Unis sont acheminés au Canada afin d'être réexportés vers
le Vieux continent.
Devenue plus attractive au plan tarifaire, l'Union européenne fait naître des
vocations chez les opérateurs canadiens.
L'entreprise White Cap était jusqu'en 2019,
essentiellement présente en France avec de
la chair de crabe des neiges à la marque
Luxury. Des produits distribués en restauration hors foyer (RHF) ou aux cuiseurs approvisionnant les rayons marée des grandes et
moyennes surfaces (GMS). « Nous mettons en place une stratégie de développement en Europe et notamment en France,
explique François Talpaert, responsable des
ventes. Nous avons recruté une équipe
commerciale et qualité pour développer
l'ensemble de nos gammes de crustacés et
de mollusques (homard, crevette nordique,
crabe, noix de Saint-Jacques...). L'offensive
vise non seulement la RHF, l'industrie ou
les cuiseurs, mais également les GMS et le
home-service. » ■

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