Produits de la mer - n°166 - octobre 2016 - 41

Dossier ❘ CRUSTACÉS DE LUXE HOMARD Un marché très volatil Les évolutions des prix du homard sont devenues particulièrement imprévisibles. Sur un marché en voie de mondialisation, la demande croissante des marchés émergents joue un rôle non négligeable dans les variations observées. Enquête : Anne-Caroline RENARD CRUSTACÉS DE LUXE, TOUJOURS PLUS CHERS Homard americanus, l'offre stimule la demande A u cours des dernières années, les prix des crustacés ont fait preuve d'une grande volatilité. Et, indiscutablement, ceux du homard vivant sont les plus instables. Un phénomène que l'engouement croissant dont il jouit ne suffit pas à expliquer. De fait, les approvisionnements ont atteint des niveaux records en 2014 comme en 2015. L'an dernier, selon la FAO, les débarquements réunis de Homard americanus du Canada et des États-Unis ont atteint les 146 000 tonnes contre 86 000 tonnes en 2007. C'est au Canada que les captures ont le plus progressé, avec un +23 % en 2014. En 2015, malgré l'ouverture tardive de la pêche du Maine et le retard pris par celle de l'Île-du-Prince-Édouard, les conditions climatiques clémentes de décembre ont permis des apports importants en Nouvelle-Écosse. Tant et si bien que la production canadienne a surpassé celle de 2014. Le manque de cabillaud justifierait en partie un report de l'effort de pêche canadien sur le crustacé et la hausse des débarques. D'autant que, pour les scientifiques, le réchauffement des eaux, notamment dans le golfe du Maine, justifierait leur abondance. Comment expliquer alors, l'augmentation des prix, qui ne semble d'ailleurs nullement décourager la demande, elle aussi King crab et crabe des neiges, le vivant mieux valorisé orientée à la hausse ? « L'augmentation des approvisionnements a permis d'ouvrir de nouveaux débouchés », répond John Sackton, de SeafoodNews, lors de la dernière édition du North Atlantic Seafood Forum. L'Asie, Chine et Hong Kong en tête, s'avère toujours plus friande du rouge crustacé, en témoignent leurs importations. Rien qu'en Chine, les importations de homard vivant ont progressé de 1 000 % entre 2008 et 2015. Même si les tonnages concernés étaient faibles au départ, la croissance est remarquable et ralentit à peine aujourd'hui. Quant au homard congelé : il représente 15 % des importations chinoises de l'espèce. Un segment en très forte croissance. Au Moyen-Orient, la demande commence à frémir, compen- À savoir 159 000 t de homard (équivalent entier) débarquées en 2014 par le Canada et les États-Unis. 45 000 t de homard (toutes formes confondues) importées par les États-Unis en 2014. Langoustes : les asiatiques en sont friands sant l'amoindrissement des importations européennes. En 2015, ces dernières ont chuté de 25 % selon la FAO, à la faveur d'une crise économique qui se prolonge, d'un taux de change défavorable et des menaces terroristes qui mettent à mal le secteur de la restauration. Quelle que soit leur présentation, les cours du homard américain sont déterminés par la demande en vivant. Une question de rendement ! De 100 % pour le vivant, voire un peu plus pour l'entier cru congelé, le rendement matière oscille entre 85 et 90 % pour l'entier cuit, tombe à 20 à 24 % pour les queues de homard et ne dépasse pas 9 à 13 % pour la chair de pinces, sections et pattes. Une hausse des prix payés aux *** Flambée des prix du congelé « En 2016, nous avons observé six à sept augmentations de prix durant la pêche de printemps au Canada », confie Samir Chirchi, directeur commercial Europe de Whitecap International Seafood Exporters. En juillet, les transformateurs proposaient du homard congelé à des prix FOB de l'ordre de 25 dollars canadiens (CAD), alors que les prix, même les plus élevés, n'ont jamais dépassé les 19 CAD. Du fait d'un froid exceptionnel, qui s'est prolongé jusqu'au début du printemps, les apports sont restés faibles. Pire, en raison d'une surmortalité liée à un faible taux de protéines dans le sang des homards, les opérateurs n'ont presque pas pu exploiter les captures hivernales en vivant. Alors, tandis que les queues de homards transformées ont vu leurs cours baisser, les débarques de la pêche printanière ont vu les leurs grimper. La demande pour du vivant se conjuguant avec celles des professionnels du surgelé. L.F . PRODUITS DE LA MER N°166 OCTOBRE 2016 ❘ 41 ❘

Table des matières de la publication Produits de la mer - n°166 - octobre 2016