HorsCollection - Droit civil illustré -1 - 153

FILIATION, PREUVE BIOLOGIQUE OU SOCIOLOGIQUE
Dans les mœurs contemporaines, il arrive que l’épouse ait un amant tout en conservant son mari, qu’un enfant naisse, que les deux hommes – le mari et l’amant – se soient également (ou presque) occupés de la mère pendant la grossesse et de l’enfant dans ses premiers jours, que l’amant ait reconnu l’enfant avant sa naissance et que le mari ait voulu lui aussi en être le père. Avant l’ordonnance de 2005, ce conflit de filiation était réglé au profit de la présomption de paternité du mari si l’acte de naissance faisait apparaître son nom (C. civ., art. 312) ; sinon, au profit de la possession d’état (art. 311-12, anc. L. 1972 : « les tribunaux règlent les conflits de filiation pour lesquels la loi n’a pas fixé d’autre principe, en déterminant par tous les moyens de preuve la filiation la plus vraisemblable. À défaut d’éléments suffisants de conviction, ils ont égard à la possession d’état ». Or, il arrivait que deux possessions d’état concurrentes se fûssent formées en même temps. Désormais, ces conflits seront, en principe, tranchés par la recherche de la filiation véritable au sens biologique. Plus précisément, en droit positif, il faut distinguer plusieurs hypothèses : le droit continue à être complexe, comme il l’était avant 1972 et 2005, mais d’une autre manière : le dérèglement des mœurs multiplie les instabilités des filiations ; les situations de fait que connaissent les tribunaux sont donc très diverses : le droit aussi. Parfois, pendant sa grossesse et dans les semaines qui suivent la naissance, la femme va du mari à son amant, d’un amant à un autre, puis finalement revient au mari. La loi envisage alors quatre hypothèses. 1o) Ou bien l’acte de naissance mentionne le nom du mari et l’enfant a pendant cinq ans la possession d’état d’enfant du mari : la paternité du mari est incontestable (art. 333) et la reconnaissance par un tiers privée d’effets. 2o) S’il n’y a pas de possession d’état ou si elle est d’une durée inférieure à cinq ans, la paternité du mari peut être contestée par l’enfant, la mère, le mari ou celui qui se prétend le père. 3o) Ou bien, l’acte de naissance ne mentionne pas le nom du mari mais l’enfant a eu dès sa naissance la possession d’état d’enfant du mari : la paternité du mari est établie et la reconnaissance privée d’effets puisque l’enfant a déjà une filiation légalement établie (art. 320). 4o) Ou bien, la reconnaissance de l’amant est confortée par une possession d’état tout aussi ancienne que celle du mari (les deux hommes se sont comportés l’un et l’autre comme père de l’enfant et occupés de la mère de manière presque égale) ; la jurisprudence antérieure à 2005 recherchait alors la possession d’état la plus effective, ce qui conduisait à des pesées délicates. Aujourd’hui, le conflit de filiation est tranché par la recherche du père biologique – la règle est simple sans être satisfaisante. Voici par exemple un ménage stérile qui décide de recourir à une PMA Plutôt que l’artifice de la PMA, le médecin qui aurait dû y procéder a pratiqué une procréation naturelle, beaucoup plus agréable pour les deux intéressés ; puis, constatant la procréation, il a fait une reconnaissance prénatale ; lors de l’accouchement, le mari et lui ont successivement accouru au chevet de la mère ; après la naissance, la femme quitta le domicile conjugal pour rejoindre l’amant, qu’elle quitta quinze jours après (souvent, l’amour né dans une aventure ne résiste pas à la vie commune). Elle rejoint alors son mari. Contestation de la paternité. Avant 2005, jugé que la possession d’état effective étant incertaine, une analyse sanguine devait être ordonnée. Aujourd’hui, elle le serait toujours, même si la possession d’état était effective.

68.

FAMILLE 153

HorsCollection - Droit civil illustré -1

Table des matières de la publication HorsCollection - Droit civil illustré -1