Doctorat et Notariat - L'organisation de la liquidation du passif successoral - Tome 50 - 102

L'ORGANISATION DE LA LIQUIDATION DU PASSIF SUCCESSORAL

contestée31. Dans cette affaire, des époux communs en biens étaient tenus solidairement avec l'une de leurs deux filles d'une somme de 85 000 francs envers la
seconde. La créance ne fut pas liquidée au cours des indivisions faisant suite aux
décès successifs des père et mère. Mais entre les deux indivisions, la fille créancière
avait contracté un prêt auprès d'un établissement bancaire avec son mari.
Quelques années après le décès de sa mère, elle faisait l'objet d'une liquidation
judiciaire. À la suite de la vente d'un immeuble de la succession indivise, la banque
et le liquidateur ont demandé le paiement respectif de leur créance par prélèvement avant partage sur le produit de la vente conformément aux dispositions de
l'article 815-17 al. 1. La Cour de cassation a fait droit aux deux prétentions. Dans
les deux cas, le droit de prélèvement accordé aux créanciers était fondé sur la qualité de créanciers « antérieurs » à l'indivision. Précisément, le liquidateur agissait
par représentation du débiteur dessaisi par la procédure collective (art. L641-9, I
al. 1 C. com.). Il pouvait dès lors prélever les liquidités indivises, le prélèvement
étant un mode classique de règlement des créances d'un indivisaire contre l'indivision. La motivation de l'arrêt relative au droit de prélèvement de la banque est
plus absconse : selon la Haute juridiction, la banque « disposait, sur le patrimoine
de [son débiteur], d'un droit de gage général lui conférant la qualité de créancier de
l'indivision comme ayant pu agir sur les biens indivis avant qu'il y eût indivision au
sens de l'article 815-17, alinéa 1er, du Code civil ». Or en sa qualité de créancière
d'un indivisaire, la banque n'a jamais bénéficié de droit de gage sur les biens compris dans l'indivision32.
β) Les créances de conservation et de gestion des biens indivis
138. Il était admis, avant la réforme du 31 décembre 1976, que les dépenses de
conservation et de gestion étaient comprises dans la masse indivise car elles constituent une charge pesant sur tous les indivisaires33. Mais ces derniers n'en étaient
tenus que pour leur quote-part34. C'était refuser aux créanciers de la conservation
et de la gestion des biens indivis un droit de gage sur ces biens au cours de l'indivision lequel postulait la solidarité des coïndivisaires. Si, dorénavant, ces créanciers bénéficient d'un droit de gage sur les biens indivis, il convient de déterminer
ce que recouvre la notion de créance de conservation et de gestion.
139. La créance de conservation des biens indivis. Assurément, les créances de
conservation comprennent toutes les dépenses faites au titre des mesures conservatoires (art. 815-2 al. 1 C. civ.). Leur paiement sur les biens indivis profite tant
aux tiers créanciers qu'aux indivisaires35. Ces derniers doivent être remboursés
31. Bull. civ. I, n° 254, D. 2007, p. 2249, n° 7, obs. J. Revel, JCP 2007.I.197, n° 4, obs. H. PérinetParquet, Defrénois 2008, art. 38725 note A. Chamoulaud-Trapiers.
32. Une solution conforme aux dispositions de l'article 815-17 du Code civil devait conduire la
banque à n'être réglée que sur les biens de l'indivisaire inclus dans la procédure de liquidation
judiciaire.
33. Civ. 1, 23 juin 1964, JCP 1964.II.13819, note J. Patarin ; Civ. 1, 16 juill. 1968, JCP 1969.
II.15833, note M. Dagot ; Com., 6 nov. 1968, Bull. civ. IV, n° 313.
34. Com., 6 nov. 1968, préc. ; Civ. 3, 12 mai 1975, Bull. civ. III, n° 165. Dans le second arrêt, la
Cour de cassation a décidé qu'un indivisaire ne peut être tenu de payer l'ensemble des dépenses afférentes aux travaux effectués sur un immeuble indivis dans la mesure où « la solidarité ne s'attache pas
de plein droit ni à la qualité d'indivisaire, ni à la circonstance que l'un d'eux a agi comme mandataire des
autres, ni à celle que chacun d'eux aurait tiré personnellement profit du mandat ».
35. Civ. 1, 20 févr. 2001, Bull. civ. I, n° 41, D. 2001, IR. 906, RTD civ. 2001.642, n° 3, obs. J. Patarin,
RTD civ. 2001.916, n° 2, obs. Th. Revet, JCP 2001.I.358, n° 5, obs. H. Périnet-Marquet.

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