Les Mélanges - Mélanges en l’honneur de Jean-Paul Decorps - 163

LAURENT LEVENEUR
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d'assimilation législative, par opposition au principe de spécialité législative qui
vaut pour les communautés d'Outre-mer. Cette assimilation législative s'impose
depuis la Constitution de 1946 et elle est aujourd'hui exprimée à l'article 73 de la
Constitution de 1958, dont l'alinéa premier commence par énoncer que dans les
départements d'Outre-mer « les lois et règlements sont applicables de plein droit ».
Cependant, les spécificités locales peuvent tout de même se traduire dans les
textes par deux sortes de moyens : des adaptations et des dérogations. Ce sont les
révisions constitutionnelles du 28 mars 2003 et du 23 juillet 2008 qui ont introduit
ou développé ces facultés de modulation législative au profit des départements
d'Outre-mer22
.
1) La faculté d'adaptation est prévue par l'alinéa premier de l'article 73 de la
Constitution, qui, aussitôt après avoir posé le principe de l'assimilation législative,
ajoute que les lois et règlements « peuvent faire l'objet d'adaptations tenant
aux caractéristiques et contraintes particulières » de ces départements. L'adaptation
ne peut aller jusqu'à un profond bouleversement, mais elle peut tout de
même consister en un ajustement du droit commun.
Le domaine de la faculté d'adaptation est toutefois limité par l'alinéa 2 de
l'article 73 : les collectivités départementales concernées ne peuvent décider ces
adaptations que « dans les matières où s'exercent leurs compétences ». Comme
aucune énumération ni précision particulière n'est donnée par ce texte, on pense
qu'il s'agit des compétences normalement dévolues aux départements23
, qu'ils
soient métropolitains ou d'Outre-mer (par exemple la compétence en matière
d'action sociale ou d'aide sociale à l'enfance).
En outre, la faculté d'adaptation est subordonnée à une habilitation préalable.
Les départements d'Outre-mer doivent avoir été habilités à y procéder « selon le
cas, par la loi ou par le règlement » (art. 73, al. 2). L'alinéa 6 de l'article 73 précise
que ces habilitations sont décidées « à la demande de la collectivité concernée,
dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique ». La loi
organique est intervenue le 21 février 2007, qui a précisé les conditions de ces
demandes d'adaptation par les conseils généraux de ces départements, en particulier
une condition de motivation (art. LO 3445-1 et s., CGCT).
À ces conditions positives s'ajoute encore une condition négative : aucune
habilitation ne peut intervenir « lorsque sont en cause les conditions essentielles
d'exercice d'une liberté publique ou d'un droit constitutionnellement garanti »
(art. 73, alinéa 6 in fine de la Constitution).
2) Les possibilités de modulation normative s'accroissent encore avec la faculté
de dérogation prévue à l'alinéa 3 de l'article 73 de la Constitution aux termes
duquel « par dérogation au premier alinéa (celui qui pose le principe d'assimilation
législative) et pour tenir compte de leurs spécificités, les collectivités régies par le
présent article peuvent être habilitées, selon le cas par la loi ou par le règlement, à
n° 40.
22. Cf. A.-F. Zattara-Gros, J.-Cl. civil, « Application de la loi Outre-mer », Les DOM,
23. Cf. A.-F. Zattara-Gros, art. précit., n° 52.

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