Carrières judiciaires - Entrer à l'ENM, l'épreuve de QRC - 1re - 61

CHAPITRE II - ILLUSTRATIONS

Le code organise la présence d'aumôniers agréés (CPP, art. R. 57-9-4, R. 57-9-5,
R. 57-9-6). Il prévoit la possibilité de détenir ou recevoir des objets « de pratiques
religieuses » ou « livres nécessaires à la vie spirituelle » (CPP, art. R. 57-9-7) et la
nécessité de mettre des lieux de culte à la disposition des détenus.
À cet égard, l'administration pénitentiaire a parfois fait montre d'une certaine réticence
à mettre en œuvre les obligations découlant des textes.
En effet, la question s'est posée en matière d'agrément des ministres de certains
cultes, conformément aux dispositions des articles D. 439 et s. du Code de procédure
pénale. Il n'appartient pas, comme a pu le rappeler le juge administratif et le CGLPL, à
l'administration de décider du caractère cultuel de tel ou tel groupement ou confession,
mais de se plier à la reconnaissance opérée par le juge. Il a ainsi été rappelé à l'administration pénitentiaire qu'elle ne peut pas s'abriter derrière le nombre minoritaire de
détenus d'une confession pour refuser d'agréer un représentant du culte (point 7 de
l'avis du CGLPL et CE, 16 octobre 2013, Garde des Sceaux, ministre de la Justice et des
libertés c/ M. N... et autres). Le respect de ces prescriptions s'opère sous réserve « du
respect des contraintes de l'ordre public d'un lieu de privation de liberté » (point 3 de
l'avis du CGLPL).
Par ailleurs, les détenus ont revendiqué le droit de recevoir une alimentation conforme
à leurs convictions religieuses. La jurisprudence européenne a reconnu que l'observation des prescriptions alimentaires peut être considérée comme une manifestation
des croyances religieuses (CEDH, gr. ch., 27 juin 2000, Cha'are Shalom ve Tsedeck
c/ France ; CEDH, 7 décembre 2010, Jakobski c/ Pologne). En revanche, le Conseil
d'État n'a pas admis que pesait sur l'administration une obligation absolue de fournir
aux détenus une alimentation respectant leur croyance religieuse. Il s'appuie sur les
contraintes matérielles de gestion des établissements pénitentiaires et les nécessités
de l'ordre public, pour mettre à la charge de l'administration une seule obligation
de ne pas imposer aux détenus une alimentation contraire à leur religion. Il s'abstient d'imposer à l'administration une obligation positive de fourniture d'alimentation
conforme (10 févr. 2016). La position du juge, en adéquation avec la jurisprudence de
la CEDH est cependant en deçà des observations du CGLPL (rapport d'activité 2013).
Enﬁn, au nom du principe de laïcité et du maintien du bon ordre, l'administration
pénitentiaire doit lutter contre le développement de toute forme de prosélytisme et
sectarisme dans les lieux de détention. À cet égard, les établissements sont confrontés
au développement de la radicalisation en détention. L'analyse du phénomène est au
programme de travail du ministère de la Justice et plusieurs pistes sont suivies: celle,
en premier lieu, du regroupement des détenus radicalisés dans des quartiers dédiés,
mesure initiée en novembre 2014. Un programme de travail réunissant des spécialistes étrangers de la question est mis en place à la Chancellerie depuis mars 2015.
La réﬂexion porte sur la nécessité de développer le nombre d'aumôniers musulmans,
de développer les programmes d'enseignement en détention aﬁn de faire baisser le
taux d'analphabètes, de mettre en place des programmes d'éducation du personnel
pénitentiaire à la laïcité, un programme de coopération entre les ministères de la
Justice et de l'Intérieur. Depuis janvier 2016, un plan de déradicalisation en prison
est mis en place.

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