Revue - Gazette du Palais - N°34 du 06 octobre 2020 - 85

G a z e tte Sp é cia lisée
J u r i s p r u de n c e
IX. SUCCESSIONS ET LIBÉRALITÉS
Pas d'indemnité d'occupation pour l'indivisaire locataire 388p9

1

L'essentiel Viole l'article  815-9 du Code civil, la cour
d'appel qui condamne l'indivisaire au paiement d'une
indemnité d'occupation envers l'indivision, en retenant
que la valeur locative de l'immeuble est nettement supérieure au montant du loyer que l'indivisaire acquitte en
exécution du bail verbal dont elle est titulaire, alors que la
cour avait constaté que l'indivisaire occupait l'immeuble
indivis en qualité de locataire, de sorte qu'elle ne portait
pas atteinte aux droits égaux et concurrents des coïndivisaires.
Cass. 1re civ., 18 mars 2020, no 19-11206, Mme L. K., épouse Q.
c/ M. P. K. et a., PB (cassation partielle CA Versailles, 23 nov.
2018), Mme Batut, prés. ; SCP Capron, SCP Piwnica et Molinié, av.

Note par

Alice BOUISSOU

Avocate au barreau de
Paris, Mulon associés

C

et arrêt tranche la
délicate question de
l'indemnité d'occupation
sollicitée par un indivisaire
à son coïndivisaire locataire.

L'article 815-9, alinéa 2, du Code civil prévoit que « l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise
est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité ». La jouissance privative résulte de l'impossibilité de
droit ou de fait, pour les coïndivisaires, d'user de la chose
(v. notamment : Cass. 1re civ., 8 juill. 2009, n° 07-19465).
C'est sur ce fondement qu'en l'espèce, un frère assigne
sa sœur en paiement d'une indemnité d'occupation d'un
bien issu de la succession de leur père. Il considérait que
le loyer payé par elle aux termes du bail verbal conclu avec
le défunt était inférieur à la valeur locative réelle.

Les juges du fond accueillent le raisonnement et
condamnent l'indivisaire locataire à régler une indemnité
d'occupation.
L'arrêt est cassé par la Cour de cassation, aux motifs que
l'indivisaire occupe l'immeuble en qualité de locataire
et qu'ainsi, il ne porte « pas atteinte aux droits égaux et
concurrents des coïndivisaires ».
Ainsi, la haute juridiction exclut l'application des dispositions de l'article 815-9 du Code civil qui régit les relations
entre les indivisaires dès lors que l'occupation du bien
ne résulte pas de ce statut mais de la signature d'un
bail entre le défunt et l'indivisaire occupant, peu importe
que le bail en question soit verbal. L'indivisaire est, dans
cette hypothèse, redevable d'un loyer, peu importe que
celui-ci soit inférieur à la valeur locative de l'immeuble,
et non d'une indemnité d'occupation (Guiguet-Schielé Q.,
« L'indivisaire locataire n'est pas débiteur d'une indemnité
d'occupation », Dalloz actualité, 5 mai 2020).
La solution ainsi retenue peut toutefois poser question,
car le locataire était devenu son propre bailleur, aux côtés
des autres indivisaires. Cette confusion des qualités ne
devrait-elle pas entraîner une extinction du contrat, du fait,
notamment, de la situation d'inégalité dans laquelle elle
peut placer les coïndivisaires ? En effet, le défunt peut, en
concluant un bail prévoyant un loyer inférieur à la valeur
du marché, favoriser l'un de ses enfants au détriment des
autres, soit en empêchant, par ce contrat, les indivisaires
de qualifier l'occupation du bien de libéralité, et donc de
solliciter le rapport de l'avantage consenti à la succession,
soit, comme en l'espèce, en faisant bénéficier l'héritier de
la jouissance d'un bien dépendant de la succession à des
conditions plus avantageuses que celles qu'il aurait eues
s'il avait dû régler une indemnité d'occupation à l'indivision.

Un mandataire successoral ne peut être désigné pour consentir à un partage 388f7

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L'essentiel Un mandataire successoral ne peut être
désigné, sur le fondement des articles 813-1, alinéa 1er,
et 814 du Code civil, pour signer un acte de partage à la
place des copartageants, a fortiori dans l'hypothèse d'un
partage judiciaire dans lequel seule l'homologation du
tribunal est requise, et non la signature des parties.
Cass. 1re civ., 13 mai 2020, no 18-26702, Mme V. c/ Consorts V.
et Sté AJ UP, FS-PB (cassation sans renvoi CA Angers, 18 oct.
2018), Mme Batut, prés. ; SCP Foussard et Froger, SCP Rocheteau
et Uzan-Sarano, av.

L

a Cour de cassation apporte, dans cette affaire,
Emmanuelle HUBY
un éclairage intéressant sur
Avocate au barreau de
les limites du pouvoir du
Paris, BWG Associés
mandataire successoral, et
rappelle à cette occasion les
différences qui existent pour la régularisation d'un acte
de liquidation-partage selon qu'il est établi dans le cadre
amiable ou judiciaire.
Note par

En l'espèce, un couple est décédé, laissant pour lui succéder ses six enfants et ses deux petits-enfants venant en
représentation d'un de leur enfant prédécédé. À défaut de
partage amiable, le juge a, dans une première décision en
2008, ordonné le partage judiciaire de la communauté et
des deux successions.
En 2011, le juge statue sur les désaccords subsistants :
il homologue partiellement l'état liquidatif établi par le
notaire commis, tranche les deux difficultés persistantes,
et renvoie les parties devant le même notaire pour établir
l'acte de partage en considération de sa décision. Cet acte
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