Les Carrés Rouges - L'essentiel des Grands arrêts de droit pénal et de procédure pénale 2017-2018 - 2e - 104

L'ESSENTIEL

102

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

PÉNAL ET DE LA

PROCÉDURE

PÉNALE

12 Cass. crim., 13 déc. 1956, Laboube (minorité)
Si les articles 1 et 2 de l'ordonnance du 2 février 1945 (...) déterminent les juridictions compétentes pour statuer lorsqu'un
fait qualifié crime ou délit est imputé à des mineurs de 18 ans et pour prendre à l'égard de ces mineurs des mesures de
redressement, sauf la faculté, quand il s'agit de mineurs âgés de plus de 13 ans, de prononcer une condamnation pénale
si les circonstances et la personnalité du mineur paraissent l'exiger, encore faut-il, conformément aux principes généraux
du droit, que le mineur, dont la participation à l'acte matériel à lui reproché est établie, ait compris et voulu cet acte.

■ Faits
Lors d'un jeu, Jean Laboube, enfant de six ans, avait blessé l'un de ses camarades. Le tribunal pour enfants, l'ayant
reconnu coupable du délit de blessures non intentionnelles, avait prononcé la mesure éducative de remise aux parents.
La cour d'appel, tout en estimant que le mineur, en raison de son jeune âge au moment des faits, ne pouvait, faute de
raison suffisante, répondre devant la juridiction pénale du fait qui lui était reproché, maintenait le prononcé de la
mesure.
Cet arrêt a été cassé. Selon la Cour de cassation, saisie par le Procureur général d'un pourvoi dans l'intérêt de la loi,
aucune mesure de reclassement ne peut être prononcée à l'encontre d'un jeune enfant dès lors qu'il ne peut être
reconnu pénalement responsable faute d'avoir compris et voulu l'acte reproché.

■ Portée
Pour que la responsabilité pénale de l'auteur d'une infraction soit engagée, encore faut-il qu'il ait compris et voulu
l'acte qui lui est reproché. Il n'y a, dans cette affirmation, rien qui doive surprendre. « Avoir compris et voulu l'acte »
renvoie en effet à la notion fondamentale du libre arbitre sans lequel l'infraction ne peut être imputée à son auteur.
Or, chacun le sait, sans discernement, pas d'imputabilité et donc point de responsabilité.
La référence faite par la Cour de cassation aux principes de droit commun montre qu'en la matière, le droit pénal des
mineurs ne présente aucune spécificité. À l'égal des majeurs, ceux-là sont pénalement responsables dès lors qu'au
moment des faits ils sont discernants, capables de comprendre la portée de leurs actes. C'est dire que la minorité
n'est pas en elle-même cause d'irresponsabilité pénale. Seule l'est l'absence de discernement du mineur concerné.
L'affirmation est aujourd'hui reprise à l'article 122-8 du Code pénal dont la rédaction a été modifiée par la loi Perben I
du 9 septembre 2002. La formulation choisie doit retenir l'attention car, contrairement aux autres textes inscrits dans
ce chapitre sur les « causes d'irresponsabilité ou d'atténuation de responsabilité », celui-ci est le seul à ne pas débuter
par cette phrase « n'est pas pénalement responsable... ».
L'affirmation est même inverse. L'alinéa 1er énonce en effet que « les mineurs capables de discernement sont pénalement responsables des crimes, délits ou contraventions dont ils ont été reconnus coupables, dans des conditions fixées
par une loi particulière qui détermine les mesures de protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation dont ils
peuvent faire l'objet ». Pour autant, ce texte trouve parfaitement sa place dans ce chapitre relatif aux causes d'irresponsabilité ou d'atténuation.
Irresponsabilité pénale d'abord lorsque le mineur n'est pas discernant au moment des faits. Dans cette hypothèse,
comme le rappelle l'arrêt Laboube, l'infraction commise ne peut donner lieu à aucune réponse pénale. La seule « difficulté » posée est celle de savoir jusqu'à quel âge un mineur peut être considéré comme dépourvu le libre arbitre.

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