Les Carrés Rouges - L'essentiel des Grands arrêts de droit pénal et de procédure pénale 2017-2018 - 2e - 130

L'ESSENTIEL

128

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

PÉNAL ET DE LA

PROCÉDURE

PÉNALE

4 Cass. crim., 6 févr. 2007 (valeur probante
des procès-verbaux)
Si, aux termes de l'article L. 611-10 du Code du travail, les inspecteurs du travail constatent les infractions par des procèsverbaux qui font foi jusqu'à preuve contraire, il n'en est ainsi que dans le cas où leur auteur constate une infraction
entrant dans le champ de compétence qui lui est reconnu par l'article L. 611-1 dudit code ; que tel n'est pas le cas du
procès-verbal par lequel l'inspecteur du travail relève un délit d'outrage prévu et réprimé par l'article 433-5, alinéa 2, du
Code pénal.

■ Faits
À la suite du contrôle d'un établissement, une inspectrice du travail a fait état, dans son procès-verbal, de certains
propos outrageants de la part du directeur de l'établissement. Celui-ci, cité directement devant le tribunal correctionnel
sur le fondement des articles 433-5 du Code pénal et L. 631-2 du Code du travail pour outrage à inspecteur du travail,
est relaxé, tandis que l'inspectrice, qui s'était constituée partie civile, est déboutée. Sur les appels du Ministère public et
de la partie civile, le jugement est confirmé par la cour d'appel qui retient que les paroles litigieuses n'avaient pas été
prononcées à l'adresse de l'inspectrice et que la preuve d'une injonction qui lui avait été faite de quitter les lieux
n'était pas rapportée. Le Procureur général de la cour d'appel et la partie civile forment alors un pourvoi en cassation.
L'un des moyens fait valoir que, par dérogation à l'article 430 du Code de procédure pénale qui, en matière correctionnelle, ne reconnaît aux procès-verbaux que la valeur de simples renseignements, les procès-verbaux dressés par les
inspecteurs et contrôleurs du travail font, en application de l'article L. 611-10 du Code du travail, foi jusqu'à preuve du
contraire. En conséquence, la cour d'appel ne pouvait nier l'existence de propos outrageants à l'encontre de l'inspectrice alors qu'ils étaient relatés dans son procès-verbal. La Chambre criminelle en décide autrement aux motifs que la
force probante particulière des procès-verbaux établis par les inspecteurs du travail ne s'attache pas au délit d'outrage
qui était poursuivi.

■ Portée
Selon l'article 427 du Code de procédure pénale, le juge décide selon son intime conviction. Corollaire du principe de
la liberté de la preuve, cette règle signifie que le juge apprécie librement la force probante des éléments de preuve
qui lui sont soumis et qu'il peut les écarter et ne pas en tenir compte en application de son pouvoir souverain d'appréciation. L'article suivant, en énonçant que « l'aveu, comme tout élément de preuve, est laissé à la libre appréciation des
juges », n'est donc qu'une illustration particulière de ce principe de l'intime conviction.
Ce principe supporte toutefois quelques exceptions. La décision ici présentée vient justement illustrer les rapports entre
le droit commun et le droit spécial de la preuve en matière correctionnelle. En l'espèce était en cause la valeur
probante d'un procès-verbal dressé par une inspectrice du travail dans le cadre de ses fonctions. Selon l'article 430 du
Code de procédure pénale les procès-verbaux et les rapports constatant les délits ne valent qu'à titre de simples renseignements sauf dans les cas où la loi en dispose autrement. Autrement dit, au principe selon lequel le juge apprécie
souverainement, référence faite à l'intime conviction, la valeur probante du contenu des procès-verbaux et des
rapports, la loi peut apporter des exceptions qui contraignent alors le magistrat à tenir pour avérés les éléments retranscrits dans ces écrits. Tel est notamment le cas de l'article L. 611-10 du Code du travail (aujourd'hui article L. 8113-7)
aux termes duquel « les inspecteurs du travail, les contrôleurs du travail et les fonctionnaires de contrôle assimilés

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