Les Carrés Rouges - L'essentiel des Grands arrêts de droit pénal et de procédure pénale 2017-2018 - 2e - 138

L'ESSENTIEL

136

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

PÉNAL ET DE LA

PROCÉDURE

PÉNALE

Cass. crim., 17 sept. 2008 (écoutes téléphoniques -
conversations entre un avocat et son client)

La Chambre de l'instruction, qui retient qu'une conversation entre un avocat et son client ne peut être transcrite et versée
au dossier d'une procédure que s'il apparaît que son contenu est de nature à faire présumer la participation de cet avocat
à une infraction, a justifié sa décision.

■ Faits
Dans une information suivie pour infractions à la législation sur les stupéfiants, un juge d'instruction avait délivré une
commission rogatoire prescrivant la mise sous surveillance de la ligne téléphonique de O. X. mis en cause. Deux
communications téléphoniques adressées par O. X. à son avocat avaient alors été interceptées. Dans la première, il indiquait à son correspondant qu'il serait en retard de quinze à vingt minutes à un rendez-vous imminent. Dans la
seconde, il lui demandait confirmation de l'adresse de son cabinet. À la suite, s'étant immédiatement rendus aux
abords de l'immeuble ainsi localisé, les enquêteurs avaient interpellé O. X. et placé en garde à vue. Mis en examen du
chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants, O. X. soutenait, pour en obtenir l'annulation, que la retranscription
du contenu des communications téléphoniques avec son avocat portait atteinte aux droits de la défense et au principe
de confidentialité de telles correspondances. La Chambre de l'instruction a fait droit à cette requête aux motifs
« qu'une conversation entre un avocat et son client ne peut être transcrite et versée au dossier d'une procédure que
s'il apparaît que son contenu est de nature à faire présumer la participation de cet avocat à une infraction », ce qui
n'était pas le cas en l'espèce. Jugeant la décision justifiée, la Chambre criminelle rejette le pourvoi formé par le
parquet.

■ Portée
Longtemps, les interceptions de correspondances émises par voie de télécommunication n'ont fait l'objet d'aucun texte
spécifique dans le Code de procédure pénale. La jurisprudence, néanmoins, les admettait sur le fondement de
l'article 81 dont l'alinéa 1er énonce que « le juge d'instruction procède, conformément à la loi, à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité ». Ainsi, dans un arrêt du 9 octobre 1980, la Chambre criminelle
avait jugé qu'un juge d'instruction pouvait ordonner la mise sous écoute d'une ligne téléphonique à la double condition qu'il n'y ait ni artifice, ni atteinte aux droits de la défense. Et bien qu'elle considérait que le procédé n'était pas
contraire à l'article 8 de la Convention européenne, qui autorise les ingérences dans la vie privée lorsqu'elles sont
prévues par la loi et nécessaires à la sûreté publique, la Cour européenne a condamné la France pour violation des
dispositions conventionnelles. Selon elle, notre droit n'indiquait pas avec assez de clarté l'étendue et les modalités
d'exercice du pouvoir d'appréciation des autorités. En clair, c'était la qualité de loi, au sens matériel du terme, qui
était mise en cause, en raison de son imprécision.
Depuis, une loi du 10 juillet 1991, à l'origine des articles 100 à 100-7 du Code de procédure pénale, détermine le
régime des écoutes téléphoniques dont la mise en œuvre est limitée au stade de l'instruction. Ce n'est en effet que
dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée qu'elles peuvent être ordonnées dès l'enquête, et ce depuis la
loi Perben II du 9 mars 2004 (CPP, art. 706-95). L'autorisation d'y procéder ne relève plus alors de la compétence du
juge d'instruction mais du juge des libertés et de la détention.
En l'espèce, c'est la violation de l'article 100-5 qui était soulevée. Ce texte exclut toute retranscription possible des
« correspondances avec un avocat relevant de l'exercice des droits de la défense ». Il s'agit là d'une interdiction

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