Les Carrés Rouges - L'essentiel des Grands arrêts de droit pénal et de procédure pénale 2017-2018 - 2e - 62

L'ESSENTIEL

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

PÉNAL ET DE LA

PROCÉDURE

PÉNALE

3 Cass. crim., 25 oct. 1962, Lacour (complicité, nécessité d'un fait
principal punissable)
La Cour,
Les juges du fond ont pu déclarer qu'aucune infraction punissable ne pouvait être relevée contre Lacour et ainsi justifier
leur décision de non-lieu ; qu'il en résulte, en effet, que les actes retenus à la charge dudit Lacour, inculpé de tentative
d'assassinat, ne constituaient que des actes préparatoires... qu'en outre, si ces mêmes actes pouvaient être qualifiés
d'actes de complicité, soit par provocation, soit par instructions de données, ils ne sauraient tomber sous le coup de la loi
pénale, en l'absence d'un fait principal punissable ; qu'enfin il en est de même, en ce qui concerne la provocation non
suivie d'effet, lorsque cette provocation n'est pas prévue et réprimée par un texte formel ;
Par ces motifs, REJETTE.

■ Faits
Les faits de cette affaire ont déjà été présentés lors de l'étude de la tentative. On rappellera juste ici qu'un certain
Lacour, souhaitant la mort du fils de son amie, avait demandé à un certain Rayon de l'assassiner moyennant une
importante somme d'argent. Rayon ayant renoncé à son engagement et les faits ayant été dénoncés, Lacour fut finalement poursuivi pour tentative d'assassinat. Estimant que les charges ne pouvaient être considérées comme constitutives d'un commencement d'exécution, les magistrats écartèrent la poursuite fondée sur la tentative. Échappant aux
poursuites comme auteur principal, Lacour pouvait-il, pour avoir donné des instructions et des moyens visant au crime,
endosser le vêtement de la complicité ? La Chambre d'accusation de Paris écarta cette possibilité estimant que les actes
reprochés répondaient à la définition de la complicité mais échappaient à la répression, par suite de la défaillance
de Rayon. La solution est validée par la Chambre criminelle.

■ Portée
La solution est des plus simples à comprendre. Le complice ne commet pas une infraction autonome, il emprunte sa
propre criminalité à celle de l'auteur principal. En 1958, la Chambre criminelle avait eu l'occasion de le préciser, « le
fait principal constitue un des éléments nécessaires de la complicité... les juges doivent à peine de nullité de la
condamnation du complice constater le caractère infractionnel de ce fait principal ». Prenant acte de cette précision,
l'arrêt présenté relève avec rigueur que les faits reprochés ne peuvent tomber sous le coup de la loi pénale faute de
fait principal punissable. Rayon, s'étant abstenu volontairement de commettre l'infraction projetée, échappe à toute
poursuite. Faute d'auteur principal, Lacour ne peut être reconnu comme un complice. Auteur et complice « sont
cousus dans le même sac » notait le Doyen Carbonnier. Une telle union révèle toute la limite de la criminalité
d'emprunt. Il faut bien le reconnaître, totalement étranger au désistement volontaire de Rayon, l'impunité de Lacour
peut être difficilement acceptée.
Mais il ne faut pas se méprendre sur la portée de cette solution. Si une infraction est exigée pour que le complice soit
poursuivi, il importe peu que l'auteur principal le soit. L'acte de complicité étant rattaché au fait principal punissable et
non à l'auteur de l'infraction, l'absence de répression de ce dernier est donc sans incidence sur la poursuite du
complice. Tel est notamment le schéma possible chaque fois que l'auteur principal échappe aux poursuites pour une
cause subjective d'irresponsabilité.
Il reste néanmoins vrai que la solution retenue par la Chambre criminelle a provoqué de profondes critiques dans les
rangs de la doctrine. On l'a dit, les qualificatifs les plus forts ont été mis à contribution pour dénoncer « cette impunité

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