Hors collection - Le droit face à la disruption numérique - 1re - 115

CHAPITRE 2 - LE

DROIT PÉNAL FACE AU NUMÉRIQUE

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la liberté de la presse60. Il devra alors s'agir de faits précis, portant atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé, susceptibles de faire l'objet d'un débat
contradictoire quant à leur véracité. De jurisprudence constante, les imputations diffamatoires seront
réputées de droit faites avec l'intention de nuire. Pour s'exonérer de sa responsabilité, l'auteur devra
démontrer qu'il a tenu les propos litigieux dans un but légitime et exclusif de toute animosité personnelle et pour ce faire, apporter des éléments d'information justifiant ses propos.
371. Dans leur appréciation, les juges seront plus exigeants si l'auteur des propos est un journaliste que
s'il est un particulier. Ils considéreront qu'un auteur non professionnel n'est pas tenu d'avoir, préalablement à la diffusion de ses propos sur internet, effectué une enquête sérieuse et objective, telle
qu'elle est attendue d'un journaliste professionnel.
b) Le délit de publication, diffusion ou reproduction de fausses nouvelles et les délits autonomes
de fausses informations

372. Le délit de publication, diffusion ou reproduction de fausses nouvelles prévu à l'article 27 de la
loi sur la liberté de la presse61 n'est légalement constitué qu'à la triple condition que les faits publiés
soient faux, que leur publication ait troublé ou ait été susceptible de troubler la paix publique et que
l'auteur de cette publication ait agi de mauvaise foi.
373. Ce délit exige l'existence d'une « nouvelle ». La jurisprudence considère que ce terme doit être
pris dans l'acceptation « d'annonce d'un évènement arrivé récemment, faite à quelqu'un qui n'en a
pas encore connaissance ». Ainsi, les commentaires portant sur des faits antérieurement révélés ne
peuvent tomber sous le coup de ce texte62.
374. La fausse nouvelle n'est punissable que si elle a troublé la paix publique au sens de tranquillité
et sécurité publiques ou « si elle contient par son objet un ferment de trouble à l'ordre public, c'est-àdire de désordre, de panique, d'émotion collective ou de désarroi ». Il n'est pas nécessaire que cette
atteinte soit nationale, une fausse nouvelle de nature à troubler les relations internationales est également constitutive d'un tel trouble63.
375. Il est exigé un lien de cause à effet entre la fausse nouvelle et le trouble. L'appréciation de
l'existence du trouble (ou du risque de trouble) se fera en fonction des circonstances. La cour d'appel
de Paris, le 18 mai 1988, a ainsi considéré qu'une dépêche de l'agence France presse selon laquelle des
jeunes gens casqués, susceptibles d'être des provocateurs, étaient sortis tranquillement d'un hôtel de
ville, pour aller rejoindre une manifestation, sans être inquiétés par les forces de l'ordre, était de
nature à caractériser le délit de diffusion de fausse nouvelle.
60. « Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du
corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de la reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne
ou un corps non expressément nommés, mais dont l'identification est rendue possible par les termes des discours, cris,
menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés. »
61. « La publication, la diffusion ou la reproduction, par quelque moyen que ce soit, de nouvelles fausses, de pièces fabriquées, falsifiées ou mensongèrement attribuées à des tiers lorsque, faite de mauvaise foi, elle aura troublé la paix
publique, ou aura été susceptible de la troubler, sera punie d'une amende de 45 000 euros. Les mêmes faits seront
punis de 135 000 euros d'amende, lorsque la publication, la diffusion ou la reproduction faite de mauvaise foi sera de
nature à ébranler la discipline ou le moral des armées ou à entraver l'effort de guerre de la Nation. »
62. Cass. crim., 13 avril 1999, nº 98-83798 : Bull. crim., nº 78, p. 214.
63. Cass. crim., 7 nov. 1963, nº 62-92445.

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