Fonction Publique - Droit hospitalier - 4e - 327

Chapitre 9 * Du service public hospitalier au service public de santé

Truchet D., « Du service public hospitalier aux missions de service public en matière de santé »,
RGDM 2009, n° 33, p. 59-68
« B. - Appréciation critique
Il faudra juger ce nouveau dispositif après quelques années d'application. A priori, il semble être une manière intelligente,
d'une part, de moderniser et de revitaliser le service public, d'autre part, de marquer sa place dans un système de santé qui
menaçait de se substituer à lui. Il peut pourtant soulever quelques critiques et quelques questions.
Les uns regretteront peut-être que l'ancien service public hospitalier soit remplacé par un "service à la carte" confié à des
opérateurs dispersés. Ils y verront sans doute une menace pour son efficacité ou sa pérennité. L'article L. 6112-2 tente de
répondre à cette crainte : lorsqu'une mission de service public n'est pas assurée "sur" (sic) un territoire de santé, le directeur
général de l'ARS désigne la ou les personnes qui en sont chargées. Mais alors ce sont les autres qui crieront à un insupportable autoritarisme public : imposer des missions de service public à des opérateurs qui ne les souhaitent pas ! Susciter
des critiques opposées est peut-être le signe que le dispositif législatif est équilibré. Les inquiétudes sur le financement des
missions de service public ne manqueront pas. Elles seront justifiées par le silence de la loi à leur égard. Certaines missions
seront financées au titre des "MIGAC" (missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation) dans le cadre de la T2A,
les autres selon les règles de financement applicables à la personne qui les assure. Ce qui ne sera pas forcément très attirant
ou très rassurant pour elle.
La logique du système implique que le coût d'une mission de service public soit très précisément calculé et intégralement
compensé sans aller jusqu'à avantager celui qui l'exerce dans des conditions qui fausseraient la concurrence. C'est peutêtre là que l'imprécision et de la loi et l'hétérogénéité des missions (qui ne sont pas faciles à classer dans les catégories
communautaires de "services d'intérêt économique général" et "services d'intérêt général") provoqueront des difficultés
avec la Commission de Bruxelles ou la Cour de Luxembourg : ce serait assez paradoxal, car, pris globalement, le nouveau
système paraît beaucoup plus proche de la vision communautaire que l'ancien. En tout cas, le législateur de 2009 n'a pas
opté pour un "service universel" : ce dernier aurait supposé la participation des opérateurs qui n'exercent pas les missions
de service public à leur financement. Pour ma part, je formulerai un regret sémantique : que le législateur soit resté fidèle
à l'expression "service public". Elle me semble aujourd'hui dépassée et peu significative juridiquement. Mieux aurait valu,
à mon sens, adopter le vocabulaire communautaire et parler de services d'intérêt général ou d'intérêt économique général,
car ces termes sont aujourd'hui recevables en droit français sans reniement du modèle social français. Mais, peu importe :
l'essentiel est que les valeurs de solidarité qui sont propres au service public et plus indispensables que jamais dans notre
société aient été sauvegardées dans une présentation conforme aux canons actuels du service public. Il me semble que la loi
"HPST" (qui ne manque par ailleurs pas de défauts, à commencer par son obésité !) a su y parvenir. »
Vioujas V., « La résurrection du service public hospitalier », AJDA 2016, p. 1272
« Le service public hospitalier de la loi du 26 janvier 2016 paraît s'accorder parfaitement avec une célèbre présentation du
service public, vieille de plus de 30 ans pourtant, selon laquelle ce dernier s'apparente à un label qui, accordé à une activité,
entraîne l'application d'un certain nombre de règles constituant le statut du service public (D. Truchet, "Nouvelles récentes
d'un illustre vieillard. Label de service public et statut du service public", AJDA 1982, p. 427). À l'image de la conclusion de
l'étude en question, il ressort nettement que l'attribution du label "service public hospitalier" apporte davantage d'obligations que de prérogatives. C'est ici que le statut intègre les exigences du droit de l'Union, la compensation financière de ces
obligations devant être justifiée et étroitement contrôlée par les autorités nationales. »

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