Hors collection - Entreprises patrimoniales et droit des sociétés - 109

CHAPITRE 3 - L'ORGANISATION DES POUVOIRS
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Un autre mode de distinction entre ces deux conventions serait leur mode de détermination du prix
de la cession83
. Le particularisme de la préférence reposerait ainsi sur le fait que le bénéficiaire est lié
par le prix offert par le tiers. En revanche, il y aurait préemption lorsque le prix d'acquisition est indépendant
du projet de cession. Dans la jurisprudence et les conventions, ces termes tendent à être
employés indifféremment. La cour d'appel de Paris a solennellement rappelé en 2014 qu'en droit des
sociétés la préemption résulte non pas de la loi mais de statuts et que son caractère conventionnel
empêche de lui appliquer une définition générale : « C'est en vain que Sill invoque une définition
générale du droit de préemption qui impliquerait la substitution du bénéficiaire du droit de préemption
au candidat cessionnaire jusque dans les modalités accessoires de son offre dès lors que les stipulations
statutaires, claires et dépourvues d'ambiguïté, qui ont seules vocation à s'appliquer, ne subordonnaient
la préemption qu'aux conditions tenant aux actions cédées et au prix de transaction »84
.
Si la préemption n'a pas de définition jurisprudentielle, la préférence a désormais une définition
légale. Le nouvel article 1123, alinéa 2 du Code civil dispose que « le pacte de préférence est le
contrat par lequel une partie s'engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui
pour le cas où elle déciderait de contracter ». Dans une première approche, il semble que c'est clairement
la clause de préférence au sens strict qui ne suppose pas que le cédant ait déjà trouvé un cessionnaire
et le prix sera indépendant de l'éventuel projet de cession à un tiers. Cette interprétation n'est
cependant pas certaine. En effet, le cédant s'engage juste à proposer prioritairement au bénéficiaire de
traiter avec lui s'il décide de contracter, mais sans que soit indiqué s'il a déjà reçu une offre d'un tiers,
ce qui correspondrait alors à de la préemption, ou s'il n'a pas encore sollicité d'offre, selon un mécanisme
de préférence au sens strict. Dans l'attente d'une précision jurisprudentielle future, ce sont les
deux mécanismes que nous considérerons comme soumis au nouveau régime85
et les deux notions
seront étudiées conjointement, d'autant plus que dans les deux cas, la levée de l'option vaut transfert
de propriété, sans que le promettant n'ait à réitérer son offre86
.
261. Validité des clauses statutaires de préférence et de préemption. Les règles du droit des sociétés
sont muettes sur les clauses statutaires de préemption et de préférence, mais une jurisprudence établie
de longue date87
et la doctrine admettent leur validité lorsqu'elles sont imposées à tous les associés.
Certains auteurs restent réservés sur leur utilisation dans les SA pour les transferts de propriété à un
conjoint ascendant ou descendant, car ces opérations ne peuvent pas faire l'objet d'une clause
d'agrément88
. Le raisonnement est contestable, les juges ayant toujours retenu très logiquement que
le régime dérogatoire de la clause d'agrément devait être soumis à interprétation stricte.
83. Prat S., Les pactes d'actionnaires relatifs au transfert de valeurs mobilières, préf. A. Viandier, 1992, Litec, p. 108, nº 183.
84. CA Paris, pôle 5, ch. 8, 6 mai 2014, SA Sodiaal International c/SAS Sill, RG nº 14/03884 : Dr. sociétés 2014, comm.,
p. 139, note R. Mortier. - Confirmé par Cass. com., 2 févr. 2016, nº 14-20747, publié au Bull. ; LPA 1er
avr. 2016, nº 66,
p. 7, note B. Receveur ; JCP E 2016, p. 1231, comm. B. Brignon ; Dr. sociétés 2016, comm., p. 75, note R. Mortier ; BJS
2016, p. 329, note V. Malassigné.
85. En ce sens, Le Nabasque H., « Les avant-contrats », in dossier Le droit des sociétés et la réforme du droit des contrats,
BJS 2016, p. 518 et s., § 1. - Schlumberger E., « Les avant-contrats », in dossier Le droit des sociétés et la réforme du
droit des contrats, Actes prat. ing. sociétaire 2016, nº 147, dossier 3, § 185
86. CA Lyon, 15 nov. 1990 : BJS 1991, p. 54. - CA Paris, 14 mars 1990, aff. la Cinq : BJS 1990, p. 325, note P. Le Cannu ;
BJS 1990, p. 353 ; RJ com. 1990, p. 256, note Ch. Goyet ; RTD com. 1990, p. 413, nº 1, obs. Y. Reinhard et
C. Champaud ; JCP E 1990, II. 15784, nos
4 à 6, obs. J.-J. Caussain et A. Viandier.
87. TGI Dijon, 8 mars 1977 : D. 197, p7. 482, note J.-C. Bousquet ; JCP 1977, II. 18722, note M. Rabut ; Rev. sociétés 1977,
p. 279 et s., note D. Randoux. - Paris, 14 mars 1990, aff. la Cinq, préc.
88. Saintourens B., note ss. Cass. com., 17 mars 2009, nº 08-11268 : BJS 2009, p. 847.
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