Les Carrés Rouge - L'essentiel du droit des politiques sociales - 14e - 53

CHAPITRE 1 - Les bases constitutionnelles des politiques sociales
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justifie, quant à elle, les changements par la volonté d'assurer l'équité de l'indemnisation pour
tous les demandeurs d'emploi. Dans sa décision no
2003-483 DC du 14 août 2003 sur la loi réformant
les retraites, le Conseil constitutionnel a toutefois jugé que si « le motif d'équité inspire
plusieurs des dispositions particulières figurant dans le texte déféré », l'article 3 de la loi qui
dispose que « les assurés doivent pouvoir bénéficier d'un traitement équitable », est « dépourvu,
par lui-même, de valeur normative ». En niant toute normativité au « motif d'équité », le Conseil
a singulièrement manqué d'audace car l'équité constitue, clairement, le fondement de dispositifs
législatifs tels que celui qui a réformé de façon substantielle le régime des retraites par répartition
en 2003. Vingt ans plus tard, le législateur a été plus prudent en bannissant le mot équité de la
nouvelle réforme des retraites reportant de deux ans l'âge légal de départ et augmentant par
voie de conséquence de deux ans, d'ici 2030, la vie active des salariés et fonctionnaires concernés.
Quoi qu'il en soit, la prudence de la juridiction constitutionnelle à l'égard de la juridicité d'une
notion philosophico-morale cultive une certaine ambiguïté dans la mesure où l'équité justifie des
dérogations parfois importantes au principe d'égalité. L'erreur dans le raisonnement consiste, en
définitive, à opposer des notions - l'égalité et l'équité - qui s'enrichissent mutuellement. Selon
Michel Borgetto, il faut non pas séparer ces deux notions mais « mixer les logiques » qui les soustendent.
Le gouvernement a introduit une importante dose d'équité dans les politiques sociales en
décidant de neutraliser l'universalité des prestations familiales afin de réserver, depuis juillet 2015,
le montant maximal aux personnes dont les ressources sont les plus modestes (la diminution débutant
à partir de ressources légèrement inférieures à 6 000 € par mois pour un foyer avec deux
enfants). L'équité est clairement le fondement conceptuel des réformes les plus importantes dans
le domaine des politiques sociales et pourtant elle demeure toujours rétive à la juridicité.
■ La notion de dignité et le droit des politiques sociales
Contrairement à l'équité, la notion de dignité revêt une valeur normative. Un titre entier est
consacré à celle-ci dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. En droit
interne, la dignité a été consacrée par le Conseil constitutionnel dans sa décision de 1994 sur les
lois Bioéthique (Cons. const., 27juill. 1994, no
94-343 et 94-344 DC), laquelle a érigé la
sauvegarde de la dignité de la personne humaine en principe constitutionnel sur lequel le Conseil
s'est appuyé, quelques mois plus tard, pour fonder juridiquement la création d'un objectif de
valeur constitutionnelle relatif à la possibilité, pour toute personne, d'obtenir un logement décent
(Cons. const., 21janv. 1995, no
a, « dilué » dans ses dispositifs la notion de dignité. Par exemple, l'article 1er
95-359 DC, loi sur la diversité de l'habitat). En France, le législateur
de la loi du 29 juillet
1998 relative à la lutte contre les exclusions disposant que « la lutte contre les exclusions est un
impératif national fondé sur le respect de l'égale dignité de tous les êtres humains ». Par ailleurs,
la loi no
2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale a inséré un

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