En poche - Introduction historique au droit - 2e - 38

En 1791, la France se dote de sa première constitution écrite.
Quatre ans après la constitution fédérale américaine, elle bascule
dans un constitutionnalisme textuel qu'elle ne quittera plus, jusqu'au
texte de 1958 aujourd'hui en vigueur. Le recours à l'écrit est symbolique
de la volonté de faire tabula rasa de l'Ancien Régime : par la
rédaction claire et précise de règles, on veut mettre fin au flou qui entourait
l'usage antérieur de la coutume. En effet, si certaines lois fondamentales
étaient clairement exposées (telles que la primogéniture
et la catholicité du Roi, ou l'inaliénabilité de la couronne), l'absence
de normes explicitement établies laissait à la monarchie, dans l'esprit
des révolutionnaires, une marge de manœuvre trop large et propice à
l'édiction de mesures attentatoires aux droits naturels.
La constitution écrite doit répondre à deux impératifs. L'article 16 de la
DDHC dispose en effet que « toute société dans laquelle la garantie
des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée,
n'a point de constitution ». Ainsi, la DDHC, intégrée à la constitution,
permet de graver dans le marbre le respect des droits qu'elle énumère.
Ensuite, elle prévoit la distribution des pouvoirs entre trois
organes distincts, suivant la philosophie de Montesquieu : législatif,
exécutif et judiciaire.
Mais la séparation des pouvoirs n'est pas forcément synonyme d'égalité
entre eux. La conséquence de la nomophilie est évidemment la
domination du pouvoir législatif sur les deux autres. Il faut alors
s'assurer que les représentants du peuple n'usent pas de leur pouvoir
de manière abusive : c'est pourquoi on met en place des mécanismes
destinés à tempérer d'éventuelles ardeurs de la chambre basse (veto
royal en 1791, bicamérisme en 1795...). Mais en dépit de ces instruments,
le législatif écrase l'exécutif qui, comme son nom l'indique,
ne fait qu'exécuter les textes votés par les élus sans jouer le rôle de
contre-pouvoir. Ainsi, l'utilisation répétée du veto législatif par le roi
sera l'une des causes de la fin de la monarchie constitutionnelle. De
même, le juge devient un automate uniquement en charge de l'application
de la loi. Sa marge de manœuvre est si limitée qu'apparaît le
« référé législatif » : si le besoin d'interpréter la loi se fait sentir à
l'occasion d'une instance, le juge est tenu de saisir le corps législatif,
qui lui seul peut donner le sens du texte.
L'UNIFICATION DU DROIT, COROLLAIRE DE L'APPLICATION
DU PRINCIPE D'ÉGALITÉ
Deux mouvements d'uniformisation du droit sont à noter, mais ont le
même point de départ : l'abolition des privilèges lors de la nuit
du 4 août 1789. En ce qui concerne le droit public, un décret paru
quelques jours plus tard abolit les privilèges territoriaux. Les anciennes
provinces sont supprimées et remplacées par des départements dépourvus
de cohérence historique : c'est là une illustration de la volonté
La Révolution et le règne de la loi
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