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Partie 2 - Management stratégique
A Des objectifs contradictoires
Une première remarque doit être exprimée à ce stade, s'agissant d'un paradigme de base du management :
le pessimisme latent des analystes et des penseurs.
Lorsque Adam Smith (1776, p. 23) nous dit que : « Ce n'est pas de la bienveillance du boucher, du marchand
de bière et du boulanger, que nous attendons notre dîner, mais bien du soin qu'ils apportent à leurs intérêts.
Nous ne nous adressons pas à leur humanité, mais à leur égoïsme ; et ce n'est jamais de nos besoins
que nous leur parlons, c'est toujours de leur avantage. », nous sommes au cœur du fonctionnement de
l'entreprise. Cette vision pessimiste de l'homme est partagée par tous les philosophes, de Locke à
Rousseau, de Smith à Marx et par les spécialistes du management, de Simon et sa rationalité limitée aux
partisans de la décroissance.
A. Smith (p. 197) conclut la première partie de son ouvrage par une mise en garde contre les entrepreneurs
de toute nature, en rappelant qu'il faut se méfier « ... d'une classe de gens dont l'intérêt ne saurait jamais
être exactement le même que l'intérêt de la société, qui ont, en général, intérêt à tromper le public et même
à le surcharger et qui, en conséquence, ont déjà fait l'un et l'autre en beaucoup d'occasions. » On est au
cœur de notre questionnement sur les objectifs contradictoires des parties prenantes.
Erhard Friedberg (1993) a montré qu'une entreprise était le théâtre d'un ensemble de jeux structurés
entre des acteurs indépendants, avec des intérêts divergents et contradictoires, jeux régulés par les
dépendances mutuelles des différents acteurs.
Ces derniers ont des objectifs et des projets divers et variés qui peuvent se révéler ambigus au regard des
objectifs de l'entreprise, voire être opposés. Il serait vain de dégager tous les conflits qui surviennent entre
les parties prenantes : le dirigeant contre son actionnaire (C. Ghosn contre E. Macron en 2015), le dirigeant
contre les salariés (les grèves dans la fonction publique), le salarié contre le client (les réclamations plus ou
moins réelles), le fournisseur contre le salarié (les pouvoirs excessifs des acheteurs de la grande distribution),
le dirigeant contre l'État (les modalités parfois discutables des contrôles fiscaux), le salarié contre l'État (dans
le cadre des négociations collectives), etc. Nous traiterons de trois cas d'espèce : le salarié-actionnaire, l'enracinement
du dirigeant et la comptabilité d'intention, ou comment le dirigeant peut enjoliver la situation
économique par une utilisation d'artifices comptables.
1 Le salarié actionnaire
Le modèle capitaliste de base est simple : le capitaliste apporte l'argent et le salarié son travail. L'argent du
capitaliste est utilisable sur le long terme, mais le salarié en a besoin à court terme pour assurer sa survie :
le salarié doit donc accepter de rétrocéder une partie de son travail en contrepartie de son salaire ; c'est la
théorie de la plus-value marxiste, à l'origine du profit.
Nous sommes donc dans un contexte schizophrène avec le salarié-actionnaire qui attend une rémunération
immédiate et un profit ultérieur. Deux questions se posent à ce stade : l'actionnariat salarié a-t-il un impact
sur la performance de l'entreprise ? et la présence d'administrateurs salariés améliore-t-elle la performance ?
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