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L'ESSENTIEL DE L'HISTOIRE DES INSTITUTIONS
du temps, l'immunité, d'abord judiciaire, devient totale : les agents royaux ne peuvent plus rendre
la justice royale sur ces terres, ni percevoir des amendes ou confisquer des biens. En somme, le
bénéficiaire de l'immunité exerce en lieu et place de l'agent les prérogatives de puissance
publique.
Une aristocratie puissante peut dès lors évoluer, certaine de conserver ses prérogatives. Elle cherche
à amplifier sa puissance économique ainsi que sa puissance politique. La faiblesse des Carolingiens
dans la seconde moitié du IX
e siècle et l'éloignement géographique du pouvoir central amènent les
potentes à se comporter en véritables princes dans leur territoire. Contrôlant les châteaux et forteresses
militaires, ils assument la défense de leurs terres (face aux raids vikings, aux ambitions des
seigneurs voisins, etc.), perçoivent l'impôt en propre et rendent une justice locale.
Cette efficacité militaire et administrative leur permet de s'attacher une clientèle étendue. De cette
façon, des principautés autonomes se forment peu à peu au cours du siècle, générant des
réseaux vassaliques qui s'émancipent du pouvoir royal. La pratique du serment, instauré par
Charlemagne, amène les ducs et les comtes à exiger eux-mêmes des serments à l'intérieur de
leurs terres.
En conséquence, ces différents éléments conduisent à l'avènement progressif d'un système
féodal dont le pouvoir central se trouve être la première victime. Si les premiers Carolingiens
recherchent une cohésion territoriale, les IX
e et X
e siècles se caractérisent par une atomisation du
territoire en de multiples entités indépendantes.
b) L'émancipation des grandes principautés
La dislocation du pouvoir laisse apparaître des fissures dans la pratique du serment puisque l'autorité
publique n'est plus apte à rivaliser avec les ambitions personnelles des potentes. De plus, cette
pratique finit par fragiliser le pouvoir central. Auparavant, les sujets obéissaient au roi du fait de sa
fonction. Désormais, ils obéissent au roi par respect d'un serment. La royauté devient contractuelle.
Lorsque le pouvoir royal ne pourra plus assurer ses obligations, les potentes s'en
détourneront.
De surcroît, les invasions vikings des IX
e et X
e siècles détériorent la crédibilité royale. Le roi, qui a la
charge de protéger son peuple et d'assurer la paix, ne parvient pas à faire cesser les raids. L'incapacité
à défendre le territoire est perçue comme une rupture dans les engagements réciproques
liés au serment. Cette défaillance permet à certains potentes de s'illustrer sur le champ de bataille.
C'est le cas d'Eudes, comte de Paris, qui défend victorieusement la ville au cours de l'hiver 885886.
Cet épisode fait vaciller la dynastie carolingienne et mène, en 888, à l'élection d'Eudes en
tant que roi des Francs. La résurgence du principe électif,d'origine germanique, continue d'affaiblir
le pouvoir central.

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