Mémentos - Droit de l'aide et de l'action sociales - 3e - 29

CHAPITRE 1 - Introduction
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19. La nécessité de maintenir le lien social : l'articulation entre les droits et les
devoirs sociaux. L'une des caractéristiques de l'aide et de l'action sociales à la française
consiste à maintenir le lien social44
en mettant en œuvre de façon concrète l'exigence de
solidarité nationale qui doit compléter, voire combler les carences de la solidarité familiale,
l'intensité de celle-ci variant selon les sociétés. Pour s'en tenir à l'Europe, comme
le relève Serge Paugam, « les droits et devoirs qui relèvent du lien de filiation sont interprétés
de façon différente selon que l'on vit en Europe du Nord ou en Europe du
Sud »45
. Léon Bourgeois, dans son célèbre ouvrage Solidarité46
, avait mis en évidence la
.De
notion cardinale de dette sociale entre les générations ; il faisait de la solidarité le
fondement du lien social en évoquant « la dette de l'homme envers la société »47
son côté, la philosophe Simone Weil affirmait dans un célèbre ouvrage édité par
Camus que « la notion d'obligation prime celle de droit, qui lui est subordonnée et
relative. Un droit n'est pas efficace par lui-même mais seulement par l'obligation à
laquelle il correspond »48
. Le droit de l'aide et de l'action sociales n'ignore pas, sans
tomber nécessairement dans le travers anglo-saxon de l'exigence d'une contrepartie, la
notion de devoir, corrélée à celle du droit de bénéficier d'une prestation pour maintenir
et enraciner le lien social entre les individus. Cette articulation entre les droits et les
devoirs est au cœur de la loi de décembre 2023 sur le plein-emploi, qui impose aux
bénéficiaires concernés du RSA une activité hebdomadaire de 15 heures qui devrait se
généraliser à l'ensemble des départements à partir de 2025.
2) Un droit prisonnier de deux modèles sociaux : Bismarck contre
Beveridge ou Bismarck avec Beveridge ?
20. Assurance versus assistance ? Les spécialistes de la question sociale opposent
deux modèles de protection sociale dont la France aurait réceptionné les principaux
ingrédients pour créer un modèle social original. Les deux conceptions de la protection
sociale viennent d'outre-Manche et d'outre-Rhin :
- outre-Rhin, le système bismarckien mis en place par le chancelier prussien Bismarck
à partir de 1881 visait à assurer, dans le cadre d'un système proche de l'assurance,
une solidarité professionnelle face aux risques sociaux ;
- outre-Manche, le système beveridgien issu du rapport Beveridge « National Insurance
and Allied Services »du 1er
.
décembre 1942, auquel s'était intéressé le
général de Gaulle, cherchait à mettre en œuvre une solidarité nationale dans le
cadre d'une protection sociale49
Le rapport Beveridge repose sur les « trois U » (universalité, uniformité, unité) et a exercé
une influence non négligeable sur l'adoption, en 1945, du plan français de sécurité
sociale50
. Amédée Thévenet a bien résumé les différentes conceptions de la protection
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44. Paugam S., Le lien social,2e
éd., 2009, PUF, Que sais-je ?, nº 3780.
45. Paugam S., ibid., p. 116.
46. Bourgeois L., Solidarité, 1896, Armand Colin & Cie.
47. Bourgeois L., ibid., p. 115.
48. Weil S., L'enracinement, 1949, rééd. 2021, Petite biblio Payot, p. 13.
49. Pépy D., « Un projet anglais, le plan Beveridge », Dr. soc. 1945, p. 154 ; Palier B. et Bonoli G., « Entre
Bismarck et Beveridge. " Crises " de la sécurité sociale et politique(s) », RF sc. pol. 1995, p. 668.
50. Kerschen N., « La doctrine du rapport Beveridge et le plan français de sécurité sociale de 1945 »,
Dr. ouvrier 1995, p. 415.

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