Les Carrés Rouge - L'essentiel du droit des biens - 16e - 52

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L'ESSENTIEL DU DROIT DES BIENS
revanche, il est en droit d'exiger une réparation dès lors que ces inconvénients excèdent cette
limite. Après avoir justifié cette responsabilité en se fondant sur l'ancien article 1382 du Code
civil, les tribunaux fondent leurs décisions sur le principe général du droit selon lequel « nul ne
doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage »(Cass. 2e
civ., 19 nov. 1986, nº 8416379).
La responsabilité tenant au voisinage n'est pas tant fondée sur la faute que sur le
dommage anormal (ex. : le trouble anormal peut provenir d'une usine polluante et bruyante qui a
pourtant obtenu toutes les autorisations administratives nécessaires à son fonctionnement et ne
commet aucune faute).
2) La mise en œuvre
* L'APPRÉCIATION DU CARACTÈRE ANORMAL DU TROUBLE
La mise en œuvre de la responsabilité pour trouble de voisinage est donc liée à l'existence d'un
trouble anormal. Il est reconnu comme tel soit lorsqu'il est important, soit lorsqu'il est répétitif (le
défaut d'ensoleillement, le bruit... constituent des troubles normaux s'ils sont de courtes durées et
épisodiques, anormaux s'ils sont fréquents et durables). Son appréciation se fait in concreto. Les
juges du fond apprécient souverainement l'anormalité en tenant compte des circonstances de
temps (jour ou nuit, dimanche ou semaine, installation antérieure ou postérieure...), de lieu (zone
industrielle ou résidentielle). Les juges prennent en considération également la réceptivité personnelle
de la victime (plus ou moins grande nervosité, plus ou moins bon sommeil...). Le préjudice
supportable, et donc le caractère anormal du trouble, est apprécié en fonction de chaque victime
et de son environnement.
La jurisprudence a tendance à admettre de façon extensive les troubles anormaux de voisinage.
Tout peut devenir un trouble anormal (le chant d'un coq en ville, le stockage de meules de foin
en limite de propriété, un chantier qui se prolonge...). La loi nº 2021-85 du 29 janvier 2021 visant
à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises prévoit que soient
étudiés les critères d'appréciation du caractère anormal du trouble de voisinage pour aider les
maires confrontés à des conflits de voisinage provoqués par de nouveaux arrivants dans les
campagnes. Elle introduit dans le Code de l'environnement « les sons et odeurs » comme caractéristiques
des espaces naturels faisant désormais partie du patrimoine commun de la Nation. Une
fois identifiés par les services régionaux de l'inventaire du patrimoine, ces éléments sonores et
olfactifs seront opposables aux habitants qui s'en plaindraient et invoqueraient des troubles anormaux
du voisinage. La loi prévoit par ailleurs que le gouvernement remette au Parlement un
rapport sur la possibilité d'introduire dans le Code civil une définition des troubles anormaux de
voisinage. Le projet de réforme de la responsabilité délictuelle envisage également d'introduire de
nouvelles dispositions légales relatives à cette responsabilité.

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