En poche - Régimes des libertés et droits fondamentaux - 5e - 25

La liberté de réunion
La liberté de réunion protège le regroupement momentané de personnes
afin d'entendre ou d'exposer des idées et des opinions
et de se concerter pour la défense d'intérêts communs. En droit
interne, la liberté de réunion est toujours en attente d'une consécration
constitutionnelle. Elle ne bénéficie que d'une reconnaissance législative
cantonnée aux réunions publiques, et encore, à condition qu'elles ne se
tiennent pas sur la voie publique. Les réunions privées - qui font l'objet
d'une invitation personnalisée - relèvent a priori du droit à la vie privée
(CE, 5 févr. 1937, Bujadoux).
C'est pourtant à propos de la liberté de se réunir que l'arrêt fondateur de
la jurisprudence administrative en matière de libertés a été rendu, arrêt
dans lequel le Conseil d'État a fait de la liberté le principe et de la mesure
de police administrative l'exception (CE, 19 mai 1933, n° 17413, Benjamin).
Des restrictions sont ainsi possibles s'il existe un risque de trouble
à l'ordre public et si la mesure de police est adaptée et proportionnée.
En ce sens, pendant l'état d'urgence sanitaire, les réunions ont pu être interdites
ou limitées à un nombre réduit de participants afin de protéger la
santé publique (CE, ord., 11 juin 2021, n° 453236, La France insoumise).
La liberté de manifestation
Fondements
La manifestation est un rassemblement, statique ou mobile, sur la
voie publique d'un groupe organisé de personnes aux fins d'exprimer
collectivement et publiquement une opinion ou une volonté
commune (Cass. crim., 9 févr. 2016, n° 14-82234). Se déroulant sur la
voie publique, elle est susceptible d'entrer en conflit avec d'autres droits
(liberté de circulation, liberté du commerce et de l'industrie...), ce qui justifie
son encadrement.
En droit européen comme en droit interne, les fondements de la liberté
de manifester sont indirects : la CEDH y voit une composante de la
liberté de réunion (art. 11) quand le Conseil constitutionnel déduit de la
liberté de communication des pensées (DDHC, art. 11) « le droit d'expression
collective des idées et des opinions » (Cons. const., 18 janv.
1995, n° 94-352 DC).
La Cour de Strasbourg rappelle que les États ne peuvent interdire une
manifestation qu'en cas de menace sérieuse de trouble à l'ordre
public. Aussi la Russie a-t-elle été condamnée pour avoir empêché une
manifestation en faveur des droits des homosexuels (CEDH, 21 oct. 2010,
n° 4916/07, Alekseyev c/ Russie). Le seul fait qu'une manifestation puisse
offenser ou gêner des personnes opposées aux idées exprimées ne peut
justifier son interdiction. Les États doivent aussi assurer - obligation
de moyens - le déroulement pacifique de la manifestation (CEDH,
21 juin 1988, n° 10126/82, Plattform ärtze für das Leben c/ Autriche).
En droit interne, le décret-loi du 23 octobre 1935 (dont les dispositions
figurent désormais aux articles L. 211-1 à L. 211-14 du Code de la sécurité
intérieure) conditionne la liberté de manifester à une déclaration préalable
auprès de l'administration indiquant l'identité des organisateurs,
leurs domiciles, le jour, l'heure et l'itinéraire de la manifestation. Ainsi
informé, le préfet ou le maire peut organiser l'encadrement nécessaire
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