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86 Cours de droit des biens
personnes est ainsi, sous l'angle patrimonial, présent dans deux patrimoines
distincts. Dans celui du créancier, l'obligation est à l'actif ; mais dans
celui du débiteur, l'obligation est une dette, au passif.
Dans la finance, on s'enrichit grâce à la dette : c'est le principe de l'effet de
levier (si l'emprunt « coûte » moins en frais et intérêts que les bénéfices tirés
du bien acheté grâce aux fonds empruntés). Le juriste reste plutôt fidèle au dicton
populaire « qui paye ses dettes s'enrichit » : la dette grève le patrimoine de
la personne, dont les actifs saisissables sont à la merci du créancier impayé et
téméraire. Lorsque la dette disparaît, la valeur nette du patrimoine augmente.
La qualification de la créance comme un bien ne devait déjà pas aveugler sur
son régime car en tant que pure création juridique, elle n'est pas un bien aussi
simple à appréhender qu'une table ou une œuvre de l'esprit (elle demeure un
lien de droit : v. supra, nº 85). Mais la dette, elle, n'est pas un bien du tout. On a
donc longtemps considéré que puisqu'elle n'était pas un bien, on ne pouvait
« logiquement » pas en disposer... et donc pas la transférer. C'était un abus de
théorie juridique : le fait que la libre disposition soit généralement liée à la qualification
de biens (et encore, cela concerne le plus souvent les choses appropriées)
ne signifie pas qu'on ne puisse transférer que des biens - si tant est que
la loi le permette. La transmission de la dette se fait sous des conditions précises,
prévues par la loi ou le contrat, la cession conventionnelle de dette ayant
intégré le Code civil à l'occasion de la réforme du droit des obligations de 2016
sous la forme d'un contrat à trois personnes (consentent ainsi le cédant et le
cessionnaire de la dette, mais aussi le créancier inchangé : C. civ., art. 1327
et s.).
146 - La figure des obligations réelles. La Révolution française a
abouti à libérer les propriétaires des charges et privilèges de l'Ancien
Régime (v. supra, nº 45). Le Code civil consacre cette idée à l'article 686 :
les servitudes ne peuvent plus conduire une personne à être redevable
envers une chose (en réalité son propriétaire, ès qualités), elles ne peuvent
valablement relier que deux immeubles entre eux. Le propriétaire de l'immeuble
assujetti doit alors subir la servitude bénéficiant à un autre
immeuble, mais il ne doit rien de plus, le Code civil interdisant la servitude
infaciendo. Toutefois, il se peut que la servitude impose, de manière accessoire,
quelques obligations positives au propriétaire de l'immeuble servant
(v. par ex. C. civ., art. 698 : l'ouvrage nécessaire à l'exercice ou à la conservation
de la servitude peut avoir été mis, par convention, à la charge du
propriétaire du fonds servant). Il s'agit du principal exemple des obligations
réelles : une obligation à la charge du propriétaire d'une chose envers
autrui, et qui ne pèse sur la personne que parce qu'elle est propriétaire.
On parle ici d'obligation propter rem (obligation à certaines prestations positives
qui suivent la propriété de la chose), que l'on distingue des obligations scripta in
rem, qui concernent les sûretés réelles. Dans ce dernier cas, il s'agit de l'obligation
pour celui qui aurait acquis un bien grevé d'une sûreté réelle (droit réel
accessoire), s'il ne veut pas subir la saisie du créancier garanti, de désintéresser
le créancier agissant. Le propriétaire de la chose n'est pas obligé personnellement
mais réellement, du fait que sa chose était grevée d'une sûreté
réelle : il doit soit payer, soit laisser le créancier se payer sur la chose.

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