Annales corrigées et commentées - Droit des obligations - L2 - 8e - 92

l'immeuble se heurte à un sérieux risque de rejet (A) et, d'autre part, si la substitution
d'une demande en dommages-intérêts représentant le coût de cette opération permettrait
d'obvier à ce risque (B).
Il est important de le préciser
pour ne pas rester en l'état d'une
qualification vague
A) S'agissant des risques de rejet de la demande
Argumentez en prenant appui sur
les conditions légales
La demande en démolition et en reconstruction de la piscine s'analyse en une
demande d'exécution du contrat en nature. Il s'agit en effet de l'un des remèdes à
l'inexécution du contrat prévu par l'article 1217 du Code civil qui permet d'obtenir
l'exécution des termes convenus du contrat. En l'occurrence, ces termes incluaient la
construction d'une piscine avec un escalier en plage et non avec une échelle et, de
façon implicite, la pose d'un système de filtrage fonctionnel et parfaitement sûr pour
la santé. C'est l'article 1221 du Code civil qui régit l'exécution en nature du contrat en
disposant que « le créancier d'une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre
l'exécution en nature sauf si cette exécution est impossible ou s'il existe une disproportion
manifeste entre son coût pour le débiteur de bonne foi et son intérêt pour
le créancier ». En opposant que des réparations et aménagements sont possibles
sans démolir l'intégralité de l'ouvrage, la société GLUT argumente sur le terrain de la
« disproportion manifeste » entre le coût pour le débiteur de bonne foi et l'intérêt pour
le créancier, celle-ci ne niant pas la possibilité de cette exécution en nature.
En supposant la société GLUT de bonne foi, il est difficile de déterminer s'il existe
en l'espèce une « disproportion manifeste » dès lors que cette notion juridique est
indéterminée. L'on sait que la somme nécessaire pour démolir et reconstruire est de
100 000 euros tandis que les aménagements proposés par la société GLUT sont de
20 000 euros. On sait aussi que lesdits aménagements ne satisfont pas pleinement la
prévision contractuelle puisque l'escalier serait un escalier droit et non un escalier de
type plage. Au-delà de l'aspect esthétique, on peut concevoir qu'une telle substitution
ait des conséquences dommageables pour Vanessa : lorsque les usagers de la
piscine sont handicapés ou âgés, l'accès par un escalier droit n'est pas forcément
une solution adéquate. Or, il est possible que Vanessa ait entendu rendre sa piscine
accessible à de telles personnes. Aussi, on peut argumenter en ce sens que s'il existe
une différence de 80 000 euros entre les deux solutions préconisées, celle proposée
par la société GLUT étant tout de même onéreuse et n'étant pas de nature à satisfaire
pleinement l'intérêt du créancier, il n'existe pas de « disproportion manifeste » au sens
de l'article 1221 du Code civil.
B) S'agissant de la demande de dommages-intérêts
Pour échapper à tout débat sur la disproportion manifeste, Vanessa envisage de solliciter,
en lieu et place de l'exécution en nature du contrat, des dommages-intérêts
couvrant le coût de la démolition et de la reconstruction. Précisons que sur le terrain
procédural, une telle évolution des demandes ne pose pas de difficulté sérieuse (il
s'agit d'une demande incidente additionnelle liée aux prétentions originaires par un
lien suffisant : CPC, art. 70). Cette stratégie permet-elle de rendre inopérant l'argument
de la disproportion manifeste ?
À ne s'en tenir qu'à la lettre des textes, la réserve de la disproportion manifeste, insérée
à l'article 1221 du Code civil, ne concerne que la demande d'exécution en nature
du contrat. Les dommages-intérêts sont un remède distinct de l'exécution en nature
(C. civ., art. 1217). Toutefois, l'esprit de la législation est d'introduire un contrôle de
proportionnalité destiné à éviter de faire peser sur le débiteur une charge excessive
eu égard à l'intérêt du créancier, préoccupation qui concerne aussi les demandes
de dommages-intérêts dès lors qu'elles sont chiffrées à un montant équivalent à la
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