Annales corrigées et commentées - Droit constitutionnel - L1 - 8e - 60

et libertés un élément essentiel (4°). En outre, le texte de cette loi s'inscrit dans la
pensée de Rousseau qui défend la souveraineté populaire par l'expression directe
du peuple, second volet de la démocratie libérale, en affirmant clairement
l'origine ou la source du pouvoir politique : « Seul le suffrage universel est la source
du pouvoir » (1°). Ainsi, le texte de loi commenté invite l'exécutif constituant à emprunter
la voie de la démocratie représentative, mais seulement au second plan :
« C'est du suffrage universel ou des instances élues par lui que dérivent le pouvoir
législatif et le pouvoir exécutif » (1°). On retrouve ici la conception de deux figures
majeures de l'histoire politique française, à savoir, on l'a vu, d'un côté, Rousseau
avec la souveraineté populaire, démocratie directe, et de l'autre, Sieyès qui défendait
le principe d'un gouvernement représentatif dont il avouait qu'il ne saurait
être considéré comme étant une démocratie au sens premier du terme.
Après avoir affirmé le suffrage universel comme premier principe cardinal du
régime républicain, la loi constitutionnelle du 3 juin 1958 l'a imposé à l'exécutif
constituant de la future Ve
République en précisant que le projet de loi constituÉtait-ce
utile ?
tionnelle est enfin adopté par référendum, source du pouvoir, avant sa promulgation
dans les huit jours par le président de la République d'alors, René Coty. Il
faut admettre aussi que Charles de Gaulle tenait à cette adoption référendaire
pour légitimer la nouvelle constitution dont la procédure d'élaboration était juridiquement
contestable. Effectivement, conformément à cette loi du 3 juin 1958, le
référendum a eu lieu le 28 septembre 1958, et le 4 octobre 1958, soit exactement
sept jours plus tard, le président René Coty a signé, impuissant et hébété, la fin de
son propre bail à l'Élysée.
Enfin, si l'on se projette dans ce qui sera la Constitution de la Ve République dans
son application concrète, on remarquera que Charles de Gaulle avait probablement
une conception personnelle du pouvoir, ce qui a été critiqué notamment
après qu'il a affirmé lors de sa conférence de presse du 31 janvier 1964 que « l'autorité
indivisible de l'Etat est déléguée toute entière au président par le peuple qui
l'a élu » ; mais on sait aussi qu'il était attaché à la source populaire du pouvoir
au point où il a quitté le pouvoir immédiatement après la perte du référendum
du 27 avril 1969 (projet de loi relatif à la création de régions et à la rénovation du
Sénat). De nos jours, cette forme de démocratie populaire, que le constituant du
3 juin 1958 affirmait et à laquelle de Gaulle tenait, est de plus en plus malmenée.
58
Annales corrigées et commentées - Droit constitutionnel - L1 - 8e

Table des matières de la publication Annales corrigées et commentées - Droit constitutionnel - L1 - 8e
