Mémentos - Introduction historique au droit - 12e - 97

CHAPITRE 4 - Unification culturelle et sédimentation coutumière (VIII
e-XII siècles)
e
97
la coutume de Normandie dans un périmètre défini, mais rayonnent sur la Bretagne et le
Poitou. Autre famille coutumière, le groupe des coutumes de Picardie Wallonie
marquées par un fort esprit communautaire (droits collectifs des membres de la famille,
droit du lignage sur les biens). Un autre ensemble est constitué par le groupe de l'Artois
et des Flandres avec de multiples coutumes de villes, seigneuries et châtellenies.
La restauration de l'autorité des princes à partir du XII
e siècle a pour conséquence l'élargissement
des ressorts coutumiers en ensembles cohérents au sein des grandes divisions
géographiques couvertes désormais par leur autorité. Ainsi voit-on émerger des
coutumes à l'échelle d'une province vers 1200, avec la coutume de France « autour
de Paris », celles d'Anjou, de Touraine, du Maine et de Poitou, etc. Réduisant la multiplicité
coutumière, cette carte élargie des coutumes ne fait pas cependant disparaître la
fracture qui différencie les coutumes du nord et du midi de la France jusqu'à la révolution
de 1789.
3* LE RECUL DE L'ORDRE JURIDIQUE
Les lois nationales ont disparu avec la fusion ethnique, les capitulaires royaux ont cessé
avec le déclin de l'autorité royale, et seul le droit canonique préserve son unité au sein
d'une Église puissante et organisée. Il influe sur le droit séculier et l'imprègne de ses principes.
Ce repli juridique s'accompagne aussi d'un débordement du droit privé sur le droit
public alors que son contenu se concentre sur les relations contractuelles entre les
hommes et leur rapport à la terre, en dehors de tout cadre institutionnalisé (A).
Empirique, approximative, la coutume est appliquée localement par une justice
segmentée entre les différentes seigneuries qui n'est plus que le pâle reflet de la justice
carolingienne du mallus et contribue encore à la diversification coutumière (B).
A- L'affaissement du droit
1) L'imprégnation du droit par la religion
L'autonomie du droit par rapport à la religion recule par rapport à la période romaine.
Faute d'école de droit à même de former des juristes, ce sont les clercs qui s'approprient
la connaissance juridique et la rapprochent de la loi chrétienne. L'idéal de justice antique
est confondu avec la justice divine et les lois sont conçues comme outils au service des
principes chrétiens. Le terme même de « droit » qui sanctionne la « rectitude » et se
retrouve dans toutes les langues européennes a détrôné le terme romain de ius àpartir
du IX
e siècle5
. Son hégémonie linguistique illustre ce rapprochement vers le sacré, et l'incorporation
de la morale chrétienne dans le modèle juridique pensé des relations humaines.
Différents domaines sont particulièrement affectés par cette imprégnation du sacré. Le
pouvoir du roi d'abord depuis 751 est légitimé par le sacre, cérémonie religieuse qui
confère au monarque un charisme particulier et lui donne la qualité d'élu de Dieu.
--
5. Lovisi Cl., Introduction historique au droit, rééd. 2011, Les cours du droit, p. 107.

Mémentos - Introduction historique au droit - 12e

Table des matières de la publication Mémentos - Introduction historique au droit - 12e