Mémentos - Droit des libertés fondamentales - 6e - 121

CHAPITRE 7 - Le droit au respect de la dignité humaine
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[...] qui était encerclé par des agents de la sécurité macédonienne. Une fois à bord de
l'avion, le requérant fut jeté à terre, attaché et mis de force sous sédatifs. Il demeura
dans cette position pendant tout le vol à destination de Kaboul (Afghanistan) via
Bagdad [...] »).
146. La différence entre le traitement inhumain et le traitement dégradant est la
suivante : le traitement inhumain vise à infliger des souffrances mentales ou physiques,
alors que le traitement dégradant a pour but d'humilier ou de rabaisser l'individu.
Cette différence peut être illustrée grâce à l'arrêt Irlande c/Royaume-Uni précité.
Étaient en cause les cinq techniques d'interrogatoire utilisées par les Britanniques en
Irlande du Nord (station debout contre un mur, encapuchonnement, soumission au
bruit, privation de sommeil, privation de nourriture). Il s'agit d'un traitement inhumain,
car il a créé sinon de véritables lésions, du moins de vives souffrances physiques
et morales, mais aussi des troubles psychiques aigus en cours d'interrogatoire. L'isolement
cellulaire total8
est également considéré comme un traitement inhumain.
Dans l'affaire Irlande c/Royaume-Uni,il s'agit également d'un traitement dégradant,
car il crée des sentiments de peur, d'angoisse et d'infériorité propres à humilier, à avilir
et à briser la résistance physique ou morale. Dans le même ordre d'idées, dans un arrêt
du 21 février 2019, Gablishvili e.a. c/ Géorgie, la Cour condamne la Géorgie pour traitement
dégradant, car les requérants ont reçu des coups de bâton dans le cadre d'une
arrestation. Dans l'espèce Tyrer c/ Royaume-Uni9
, un châtiment judiciaire corporel sur
l'île de Man a également été considéré comme un traitement dégradant. Pour la Cour,
les peines judiciaires corporelles impliquent, par nature, qu'un être humain se livre à des
violences physiques sur l'un de ses semblables. En outre, il s'agit de violences
institutionnalisées, en l'occurrence autorisées par la loi, prescrites par les organes
judiciaires de l'État et infligées par sa police. Ainsi, même si le requérant n'a pas subi
de lésions physiques graves ou durables, son châtiment, consistant à le traiter en objet
aux mains de la puissance publique, a porté atteinte aux buts principaux de l'article 3 : la
dignité et l'intégrité physique de la personne. Le caractère institutionnalisé de ces
violences se combine de surcroît avec l'ensemble de la procédure officielle dont
s'accompagnait le châtiment et avec la circonstance que les exécutants étaient
entièrement étrangers au délinquant. En outre, un délai considérable s'est écoulé au
poste de police où la peine a été appliquée. Pour la Cour, M. Tyrer a donc éprouvé, en
sus d'une souffrance physique, l'angoisse morale d'attendre les violences qu'on allait lui
infliger. De même, s'agissant de châtiments corporels à l'école, même si le seuil de
gravité n'avait pas été atteint, la Cour européenne a exprimé sa préoccupation
concernant le caractère automatique de la sanction et le délai de 3 jours avant
l'exécution de celle-ci10
.
147. Par ailleurs, l'article 3 a été appliqué à des cas de menaces de torture11
d'attente dans le couloir de la mort12 du fait des sentiments d'angoisse engendrés.
Dans cette dernière affaire, un citoyen allemand vivant au Royaume-Uni est accusé
--
8. CEDH, 8 juin 1999, Messina c/ Italie.
9. CEDH, 25 avr. 1978.
10. CEDH, 25 mars 1993, Costello-Roberts c/ Royaume-Uni.
11. CEDH, 10 oct. 2000, Akkoç c/ Turquie.
12. CEDH, 7 juill. 1989, Soering c/ Royaume-Uni.
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