Mémentos - Droit du contentieux administratif - 5e - 103

CHAPITRE 9 - Les procédures de référé
103
fond. Par exemple, la désignation d'un expert en vue d'évaluer un préjudice peut être
refusée par le juge « lorsqu'il estime que l'absence de lien de causalité entre le préjudice
à évaluer et la faute alléguée est manifeste »108
.
. Les modalités d'appréciation de
cette condition au stade de la demande initiale ou d'une demande d'extension de la
mission sont précisées par la jurisprudence109
290. L'article R. 532-1 prévoit par ailleurs que le juge des référés peut « charger un
expert de procéder, lors de l'exécution de travaux publics, à toutes constatations relatives
à l'état des immeubles susceptibles d'être affectés par des dommages ainsi
qu'aux causes et à l'étendue des dommages qui surviendraient effectivement
pendant la durée de sa mission ». Cette précision vise le cas des référés dits « préventifs
». L'expert est alors chargé de décrire l'état existant des ouvrages situés à proximité
d'une opération de construction. Ce relevé permet ainsi de connaître avec précision
l'état des propriétés avoisinantes avant que ne soient réalisées les opérations de
travaux publics. Dans l'hypothèse où l'un des propriétaires concernés se plaindrait de
l'apparition de désordres sur ses biens, le rapport préalablement établi par l'expert
permettrait de déterminer si ces désordres sont consécutifs ou non aux travaux
publics réalisés.
291. Mais l'éventail des mesures susceptibles d'être ordonnées par le juge des référés
excède le cas de la seule mesure d'expertise (raison pour laquelle on préférera l'expression
de « référé‑instruction » à celle, également en usage, de « référé-expertise »). Le
juge administratif peut en effet prescrire toute mesure d'instruction qu'il serait au
pouvoir de la juridiction, statuant au fond, d'ordonner de sa propre initiative (v. infra,
nº 680 et s.). Cela comprend donc, outre l'expertise technique proprement dite, la
possibilité d'ordonner une audition de témoins ou la possibilité d'ordonner la
communication de certains documents.
292. La mesure la plus fréquemment ordonnée reste toutefois la mesure d'expertise.
Dans ce cas, le juge des référés désigne un expert par voie d'ordonnance, celle-ci
décrivant avec précision l'étendue de la mission confiée à l'expert. Le juge des référés
est, à cet égard, entièrement libre. Certes, il est possible que la mission qu'il confie à
l'expert recoupe la mission sollicitée par les parties ; mais le juge des référés n'est
nullement tenu par les propositions de missions qui lui sont faites : il lui appartient
d'apprécier la consistance du travail que l'expert devra accomplir afin que ce travail
soit utile, notamment en vue de son exploitation par la juridiction de fond susceptible
d'être ultérieurement saisie. La seule limite posée au pouvoir d'appréciation du juge
des référés réside dans l'interdiction de confier à l'expert le soin de se prononcer sur
des questions juridiques et non factuelles. En effet, un expert peut être chargé de
constater une situation de fait donnée (comme dans le référé‑constat), d'en rechercher
les causes (à la différence du référé constat). Mais l'expert ne peut, en aucun cas, être
amené à se prononcer sur des questions juridiques, qui relèvent du seul office du juge.
Ainsi ne peut-il être demandé à un expert de procéder à la qualification juridique d'un
fait ou de se prononcer quant à l'interprétation à retenir d'un texte normatif. Depuis
2010, l'expert peut recevoir du juge une mission de médiation à l'égard des parties
--
108.CE, 14 févr. 2017, nº 401514.
109.CE, 14 févr. 2017, nº 401514 ; CE, 26 juill. 2018, nº 415139.

Mémentos - Droit du contentieux administratif - 5e

Table des matières de la publication Mémentos - Droit du contentieux administratif - 5e