Mémentos - Droit du contentieux administratif - 5e - 22

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MÉMENTOS - DROIT DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF
même, qui conservait donc la maîtrise d'une partie de son contentieux. En droit, le
Conseil d'État ne disposait donc pas d'une compétence de droit commun, mais d'attribution.
L'évolution sera achevée par le Conseil d'État lui-même, quelques années plus
tard, dans son célèbre arrêt Cadot4
, où il se reconnaît compétent pour statuer sur un
recours en annulation formé à l'encontre d'une décision administrative pour laquelle
aucun texte ne prévoyait cette possibilité de recours devant lui. Par cette décision, le
Conseil d'État créait un précédent d'une importance majeure : il offrait la possibilité à
tout administré de le saisir directement de recours dirigés contre les décisions de
l'administration. La plénitude de compétence ainsi acquise par le Conseil allait
permettre le développement d'un contrôle efficace de l'activité administrative - et
conséquemment la constitution d'un corpus de règles prétoriennes qui forment le
fond de notre droit administratif.
2* L'ÉMERGENCE D'UN ORDRE JURIDICTIONNEL
19. Mais la justice administrative5
de cette époque n'était pas entièrement incarnée
dans cette institution dont nous venons de voir le remarquable développement. Une
partie du contentieux continuait à lui échapper au profit des conseils de préfecture,
créés comme le Conseil d'État en l'an VIII, mais dont l'histoire était moins glorieuse.
Ces conseils étaient issus de la loi du 28 pluviôse an VIII. Cette loi créait dans chaque
département un « conseil », composé de trois à cinq membres choisis par le gouvernement
; ce conseil était présidé par le préfet, qui disposait d'une voix prépondérante en
cas de partage. Ces conseils recevaient une compétence juridictionnelle d'attribution -
en sorte qu'il faut dire qu'il existait dès l'an VIII une partie de la justice administrative
qui leur était déléguée. Les matières dévolues à ces conseils de préfecture étaient assez
variées. Ils connaissaient pour l'essentiel des litiges de travaux publics, du contentieux
des contraventions de grande voirie, des réclamations en matière de contributions
directes, du contentieux domanial et de celui de l'expropriation. En pratique, les
membres de ces conseils étaient désignés parmi d'anciens administrateurs, avocats ou
juristes, notables locaux, qui témoignaient souvent d'un désir sincère de s'acquitter
honorablement de leur fonction juridictionnelle. Le rattachement de ces conseils à
l'administration active était cependant fort : ils se réunissaient à la préfecture (pour ne
pas avoir à faire déplacer leur président), au cours de séances non publiques ; leur
greffe était assurée par les services préfectoraux ; ils assumaient, par ailleurs, des
missions consultatives pour l'administration locale. Avec le temps, la nature même de
ces conseils devint trouble. On ne savait plus très bien si les conseillers de préfecture
étaient des juges qui administrent ou des administrateurs qui jugent.
20. Cette confusion était préjudiciable à l'autorité de ces conseils. Plusieurs projets de
réformes ont alors été engagés sous l'Empire libéral afin d'accentuer leur caractère juridictionnel
des conseils (en particulier, un décret du 30 septembre 1862 introduisant le
principe de publicité des audiences, prévoyant la motivation obligatoire des décisions
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4. CE, 13 déc. 1889, p. 1148.
5. AJDA 2023, p.1747, Dossier : L'unité de la juridiction administrative.

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