Mémentos - Droit du contentieux administratif - 5e - 252

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MÉMENTOS - DROIT DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF
2) Les limitations jurisprudentielles
843. Les effets de l'annulation peuvent également être limités par la jurisprudence, par
la modulation dans le temps des effets de l'annulation et la théorie du fonctionnaire
de fait.
a) La modulation dans le temps des effets de l'annulation juridictionnelle
844. L'annulation juridictionnelle d'une décision administrative a un effet rétroactif : la
décision est réputée n'avoir jamais existé. La jurisprudence a toutefois reconnu au juge
la faculté de déroger à cet effet rétroactif, lui permettant ainsi de limiter les effets de
ses annulations dans l'intérêt général en les modulant dans le temps32
. Les effets
passés de l'acte, et parfois même ses effets futurs, sont ainsi validés. Cette solution
pragmatique a pour but de remédier aux effets parfois radicaux de l'annulation juridictionnelle,
de préserver la sécurité juridique et les droits acquis issus de la décision
annulée, et enfin d'éviter des annulations « en cascade ». Avant de mettre en œuvre
ce pouvoir de modulation - ce qu'il peut faire d'office ou sur demande d'une partie33
ou d'un intervenant34
-, le juge doit recueillir les observations des parties35 (il doit
préserver le droit des parties lorsqu'il envisage de préserver le droit des tiers),
et s'assurer qu'aucun autre moyen des parties ou d'ordre public que celui qu'il envisage
de retenir est susceptible de fonder l'annulation de l'acte attaqué. Il doit ainsi
opérer un bilan coûts-avantages, en mettant en balance « d'une part les conséquences
de la rétroactivité de l'annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence
et d'autre part les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et
du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets
de l'annulation ».
845. Il s'agit d'une dérogation au principe de l'effet rétroactif. Mais le caractère
« exceptionnel » de sa mise en œuvre a ensuite été abandonné, le considérant de principe
« AC ! » ayant été amendé36
afin de tenir compte de la pratique du Conseil d'État.
Une utilisation trop régulière a d'ailleurs pu faire l'objet d'une critique de la part de la
doctrine, qui dénonce une pratique « banalisée » portant atteinte au droit au recours37
.
846. La mise en œuvre du pouvoir de modulation doit être justifiée par le caractère
excessif des conséquences de la rétroactivité de l'annulation et donc de l'atteinte
portée à certains intérêts. L'incidence négative sur les finances publiques et la complication
générée pour les services administratifs chargés de tirer les conséquences de
l'annulation ne suffisent pas38
.C'est en revanche le cas de l'atteinte portée à la continuité
du service public (par ex. de l'électricité et du gaz et de l'éclairage public ou de
l'éducation39
--
32. CE, ass., 11 mai 2004, nº 255886, Association AC !
33. CE, sect., 25 févr. 2005, nº 247866.
34. CE, 28 avr. 2006, nº 242727.
35. Pour un ex., v. CE, 5 mars 2021, nº 440037 à propos de l'ord. nº 2020-303 du 25 mars 2020.
36. CE, ass., 23 déc. 2013, Société M6, nº 363978. ; CE, 14 mai 2014, nº 355924.
37. « Assez d'AC ! », AJDA 2018, p. 937.
38. CE, 11 juill. 2008, nº 298779 ; CE, 1er
juill. 2010, nº 321595.
39. CE, 31 juill. 2009, nº 296964 ; CE, 22 déc. 2017, nº 410561.
), des graves incertitudes susceptibles d'affecter la rémunération de salariés,
de l'atteinte à « la situation contractuelle passée de plusieurs millions de
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