Mémentos - Droit public des biens - 18e - 89

CHAPITRE 6 - La formation du domaine public
89
publique, il est important qu'un bien qui répond aux critères du domaine public ne
puisse pas en sortir sans un minimum de garanties. Il reste que les exigences du juge
sont parfois allées très loin : il a ainsi été jugé, à propos d'une cession de terrains entre
deux collectivités territoriales, sans changement d'affectation, que le vendeur avait
méconnu le principe d'inaliénabilité du domaine public en s'abstenant de déclasser au
préalable lesdits terrains (CAA Paris, 8juill. 2004, Région Île-de-France). Il s'agit là d'un
formalisme excessif au regard des dangers effectivement encourus pour la sauvegarde
du domaine public. C'est la raison pour laquelle le Code général de la propriété des
personnes publiques est revenu sur cette solution, comme on le verra plus loin.
Par ailleurs, le bénéficiaire d'une mise à disposition ne peut déclasser seul une dépendance
du domaine public qui ne lui appartient pas (CAA Bordeaux, 5 mars 2009,
Commune de Labéjan : la commune propriétaire est seule compétente pour déclasser
une voie communale mise à disposition d'un établissement public de coopération
intercommunale).
Il faut préciser enfin que si la désaffectation formelle est nécessaire, elle n'est pas suffisante
: elle doit être accompagnée d'une désaffectation de fait, sous peine d'illégalité,
dès lors qu'une affectation de fait suffit à incorporer un bien dans le domaine public
(CE, 22 avril 1977, Michaud). L'autorité domaniale ne peut donc déclasser un bien qui
continuerait à répondre aux critères du domaine public.
Ces principes d'origine jurisprudentielle figurent aujourd'hui à l'article L. 2141-1 du
Code général de la propriété des personnes publiques, aux termes duquel « un bien
d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1, qui n'est plus affecté à un service
public ou à l'usage direct du public, ne fait plus partie du domaine public à compter de
l'intervention de l'acte administratif constatant son déclassement ».
Sortie d'un bien
du domaine public
=
Déclassement
+
Désaffectation
Les biens qui sortent du domaine public d'une personne publique se trouvent tout naturellement
transférés dans le domaine privé de cette même personne publique.
Les limites du pouvoir de la personne publique propriétaire en matière de déclassement
Peut-on considérer que, dans le silence des textes, la personne publique propriétaire
dispose d'un pouvoir discrétionnaire pour décider de désaffecter une dépendance du
domaine public ? En réalité, si les personnes publiques disposent d'un large pouvoir
d'appréciation dans ce domaine, elles ne peuvent toutefois recourir au déclassement que
pour des motifs d'intérêt général (CE, 30 oct. 1987, Commune de Levallois-Perret). Et ce,
même si l'intérêt général en question est parfois largement entendu par le juge (voir par
exemple, CAA Douai, 29janv. 2004, SARL artisanale Sambre modelage c/Commune
de Feignies ; auparavant : CE, 23 mars 1923, Mariole).
2) Les assouplissements récents
De façon générale, il faut constater que la tendance est à l'assouplissement des possibilités
de déclassement des biens du domaine public. On ne reviendra pas sur les
Mémentos - Droit public des biens - 18e

Table des matières de la publication Mémentos - Droit public des biens - 18e
