Mémentos - Droit des biens - 14e - 91

CHAPITRE 3 - L'étendue du droit de propriété
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extraction dans le sous-sol d'autrui provoquant un vide que l'exploitant de la carrière
voisine doit remblayer26
. À la différence de l'hypothèse de l'accession, les constructions
ne sont pas entièrement réalisées sur le terrain d'autrui, elles ne font qu'y empiéter,
parfois dans des proportions minimes. Les difficultés ne doivent pas être cachées : la
partie de construction ne peut pas appartenir, par accession, au propriétaire du
terrain sur lequel elle empiète. Cette partie de construction ne peut pas appartenir au
constructeur, car cette solution conduirait à une sorte d'expropriation d'utilité privée.
La jurisprudence a dû pallier le silence du Code civil et trouver une réponse satisfaisante.
Elle est sévère et ancienne, et a suscité un débat toujours actuel sur le fondement juridique
et sur la prise en considération de l'équité en matière d'empiétement sur le terrain
d'autrui. La jurisprudence a choisi le camp de l'absolutisme et de la sévérité. Pourtant,
des solutions plus équitables existent et sont proposées par la doctrine.
1) La sévérité de la jurisprudence
126. Elle est fixée de longue date et ne se départit pas de sa sévérité. Pourtant une
prudente inflexion semble se dessiner dans la jurisprudence de la Cour de cassation.
En principe, elle autorise le propriétaire du fonds empiété d'exiger la démolition au
nom de l'article 545 du Code civil, qui précise que « nul ne peut être contraint de
céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique et moyennant une juste et
préalable indemnité ».
La portée de la solution jurisprudentielle en renforce la sévérité. Le domaine de l'empiétement
semble compris de manière large par la Cour de cassation, même dans des
hypothèses où les faits auraient pu conduire à considérer qu'il y avait plutôt construction
sur le terrain d'autrui. En présence d'un empiétement, la démolition menace le constructeur,
même en cas d'un dépassement minime27
,qu'il soit de bonne foi ou de mauvaise
foi. Le droit de propriété est bien absolu et est considéré comme n'étant pas susceptible
d'abus. Par conséquent, il ne se perd pas par le non-usage et l'action en revendication
ne peut pas faire l'objet d'une prescription extinctive. Cette sévérité prive les juges du
fond de toute liberté dans l'appréciation de la situation afin d'éviter les excès d'une solution
rigide particulièrement respectueuse du droit de propriété. Le propriétaire du fonds
victime de l'empiétement peut toujours obtenir la démolition aux frais du constructeur
de la construction s'il le demande. Il est le seul à pouvoir atténuer la sévérité de
cette jurisprudence constante en se contentant de réclamer des dommages-intérêts.
Cependant, dans une telle hypothèse, la Cour de cassation, au lieu de voir dans l'indemnité
la contrepartie de la cession de propriété, constate l'existence d'une faute caractérisée
par l'empiétement ; faute qui donne droit à une indemnisation en application des
articles 1382, 544 et 545 du Code civil. Ainsi, la sanction de l'empiétement est celle
d'une atteinte au droit de propriété, plus précisément à l'interdiction de construire sur
le terrain d'autrui et pas celle d'une expropriation privée. Seule la victime, à l'exclusion
du juge, peut « opter pour une réparation par équivalent »28
.
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26. Cass. 3e
civ., 11 févr. 2015, nº 13-26023.
27. Cass. 3e civ., 20 mars 2002, nº 00-16015 : Bull. civ. III, nº 71 ; D. 2002, p. 2075, note Caron Ch. ;
D. 2002, somm. 2507, obs. Mallet-Bricout ; JCP G 2002, 10189, note Bonnet ; JCP G 2002, I 176,
nº 6, obs. Périnet-Marquet ; JCP 2002, 1648, note Planque ; RTD civ. 2002, p. 333, obs. Revet. Dans
cette affaire, l'empiétement sanctionné était de 0,5 cm.
28. Zénati F., RTD civ. 1993, p. 851, obs. sous Cass. 3e
civ., 10 nov. 1992.
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