Mémentos - Droit des biens - 14e - 92

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MÉMENTOS - DROIT DES BIENS
127. La sanction permet donc d'ouvrir le débat sur le fondement juridique du régime
de l'empiétement dans le silence du Code civil. L'hésitation jurisprudentielle est
balayée par une position constante de la Cour de cassation en faveur de l'article 545
du Code civil, cependant, une analyse plus approfondie de la base juridique révèle que
la solution est moins évidente que ne le laisse croire la jurisprudence de la Cour de
cassation.
La première hésitation a révélé la difficulté du choix entre les règles de l'accession
(C. civ., art. 555) et la défense absolutiste du droit de propriété (C. civ., art. 545). La
Cour de cassation refuse l'application des règles de l'accession29
. Avec raison sans
doute car l'application des règles de l'accession conduit à des solutions incohérentes :
le propriétaire du fonds sur lequel empiète la construction se trouverait propriétaire de
la partie de la construction qui empiète sur son terrain alors que le constructeur resterait
propriétaire de la partie construite sur son fonds. Le principe fondateur de l'accession
qui veut que l'accessoire suive le principal ne peut pas justifier qu'un même accessoire
suive séparément chaque principal. L'accession de la partie empiétant est inconcevable
tant en pratique qu'en théorie. En revanche, l'empiétement prive le propriétaire qui en
est victime de l'utilisation de son fonds. Une question se pose alors, cette atteinte incontestable
à son droit de propriété implique-t-elle une véritable expropriation d'utilité
privée ? Certains considèrent que : premièrement, l'empiétement n'entraîne pas la
dépossession de sa propriété par le constructeur et par conséquent, ce n'est donc pas
lui qu'il convient d'indemniser mais le propriétaire du fonds qui subit l'empiétement ;
deuxièmement, ce dernier ne perd pas nécessairement sa propriété, mais subit, incontestablement,
une violation de son pouvoir exclusif de propriétaire. Une telle analyse
privilégie la sanction de l'indemnisation pour faute choisie par le propriétaire.
Cependant, ce n'est pas le fondement arrêté par la Cour de cassation qui qualifie
l'empiétement d'expropriation pour cause d'intérêt privé en référence à l'article 545 du
Code civil. Par conséquent, elle considère que l'empiétement prive le propriétaire du
terrain de sa propriété30
. Cette approche constitue un curieux renversement de l'analyse
menée dans le cadre de l'accession, qui conduit, au contraire, à transmettre la propriété
de la construction au propriétaire du sol. Il n'y a donc pas d'expropriation, mais pour
éviter une application malencontreuse des règles de l'accession, une coexistence de
deux droits de propriété : celui du propriétaire du sol et celui du propriétaire des constructions.
Cette constatation pose clairement le problème de l'empiétement. Il convient
de régler un conflit de propriété. Dès lors, le fondement choisi par la Cour de cassation
est surprenant. Une analyse maximaliste de la propriété ne permet pas de choisir un
droit de propriété au détriment d'un autre. Il renforce seulement le conflit entre des
droits de même nature. En réalité, l'empiétement entrave le droit d'user du terrain et
en partie d'en disposer. Il porte donc essentiellement atteinte à l'usus et partiellement
àl'abusus, sans conduire à une expropriation de fait. Une référence à l'article 544 du
Code civil aurait donc été plus judicieuse. L'article 1143 du Code civil, en présence d'un
contrat, apporte une solution plus satisfaisante : ce n'est pas une expropriation qui est
sanctionnée mais l'interdiction de construire sur le fonds voisin. La sanction à la violation
--
29. Cass. 3e
neté.
30. Cette conclusion ne s'impose pas à tous comme une évidence, v. Zénati F. et Revet Th., Les biens,
2e
éd., 1997, PUF, nº 167 ; Caron C., note sous Cass. 3e
civ., 20 mars 2002 : D. 2002, spéc. p. 2076.
civ., 19 févr. 2014, nº 13-12107 en ce qui concerne l'obstacle à l'acquisition de la mitoyen

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