Mémentos - Droit international privé - 14e - 87

CHAPITRE 3 - Les effets en France des jugements étrangers
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2) L'effet de titre
221. Un jugement étranger peut aussi avoir un effet de titre, qui concerne le jugement
lui-même et non les éléments qui ont été utilisés par le juge étranger. C'est le cas par
exemple lorsqu'une décision étrangère constate l'existence d'une créance. Le créancier
pourra se prévaloir de cette décision pour déclarer sa créance dans le cadre d'une
procédure collective ouverte en France. Mais il ne s'agit alors que de tenir compte
d'une situation créée à l'étranger et non d'exécuter en France la décision étrangère.
3) L'effet de fait
222. Un jugement étranger peut ensuite produire un effet de fait. L'idée est qu'un
jugement étranger est, par son existence même, une réalité ou encore un fait qu'il
faut parfois prendre en compte, indépendamment de la question de son autorité ou
de son exécution en France. Par exemple, si le débiteur d'une obligation ne peut pas
exécuter son engagement en raison d'un jugement étranger, il sera possible de
prendre en compte en France cette situation pour apprécier si l'inexécution de l'engagement
peut être justifiée par la notion de force majeure. De même, en présence d'un
jugement de divorce prononcé à l'étranger, un juge français peut tenir compte de la
séparation des époux qui en découle, sans pourtant procéder à la reconnaissance du
jugement étranger1
.
4) La reconnaissance de plein droit
Enfin, un jugement étranger peut bénéficier d'une autorité de plein droit, sans que
l'obtention de l'exequatur ne soit nécessaire. On parle alors de son effet de plano.
a) La notion
223. Ce principe de reconnaissance de plein droit a été défini par la jurisprudence.
L'arrêt fondamental est à ce propos l'arrêt Bulkley de la chambre civile de la Cour de
cassation en date du 28 février 18602
, qui a posé qu'un étranger divorcé à l'étranger
peut se remarier en France sans que le jugement étranger de divorce n'ait à recevoir
exequatur.L'objectif d'assurer la stabilité des relations sociales sur le plan international,
en évitant qu'une même personne puisse être considérée comme mariée dans un pays
et comme divorcée dans un autre. C'est ce qui ressort de l'arrêt de Wrède du 9mai
19003
:« l'annulation d'un mariage, légalement et définitivement prononcée, doit être
àl'abri de toute attaque, soit de la part de tiers, soit de la part des époux, parce que
l'état des personnes ne peut demeurer incertain, sans qu'il en résulte un trouble
profond dans les familles et une atteinte grave à l'ordre social ». Par la suite, cette jurisprudence
a été étendue à d'autres domaines. Selon l'arrêt Hainard de la Chambre des
requêtes du 30 mars 1930, « les jugements rendus par un tribunal étranger relativement
à l'état et à la capacité des personnes, produisent leurs effets en France indépendamment
de toute déclaration d'exequatur, sauf les cas où les jugements doivent
donner lieu à des actes d'exécution matérielle sur les biens ou de coercition sur les
personnes ». On peut même aller au-delà, en considérant que l'effet de plano vaut
--
1. Cass. 1re
civ., 4 mai 2011, nº 10-14142.
2. Ancel B. et Lequette Y., Grands arrêts, arrêt nº 4.
3. Ancel B. et Lequette Y., Grands arrêts, arrêt nº 10.

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