Mémentos - Droit international privé - 14e - 95

CHAPITRE 3 - Les effets en France des jugements étrangers
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A - La reconnaissance des décisions
1) Le principe d'une reconnaissance de plein droit
246. Selon l'article 36, « les décisions rendues dans un État membre sont reconnues
dans les autres États membres sans qu'il soit nécessaire de recourir à aucune procédure
». Par suite, la décision étrangère a autorité de chose jugée et peut venir
s'opposer à une action intentée dans un autre État membre (exception d'autorité de
chose jugée).
Il n'en demeure pas moins que ces principes n'interdisent pas de procéder à un contrôle
des décisions rendues dans les États membres.
2) La possibilité d'un contrôle de régularité
Ce contrôle peut intervenir de deux points de vue.
a) Le refus de reconnaissance
247. L'une des parties intéressées peut faire une demande afin que la reconnaissance
de la décision considérée soit refusée au regard des conditions posées par l'article 45
§ 1, étant indiqué qu'« en aucun cas une décision rendue dans un État membre ne
peut faire l'objet d'une révision au fond dans l'État membre requis » (art. 52).
248. Les cas de refus de reconnaissance, dans l'État membre requis, d'un jugement
prononcé dans un autre État membre sont limitativement énumérés par le règlement
et sont alternatifs. Ils sont très peu nombreux car l'objectif est de permettre un large
accueil des décisions étrangères.
249. Selon l'article 45 § 1, la reconnaissance d'une décision est refusée :
- si la reconnaissance est manifestement contraire à l'ordre public de l'État membre
requis26
. Cette première condition appelle deux séries de remarques :
* en premier lieu, il appartient à chaque État membre de définir les contours de son
propre ordre public. Cependant, le droit européen a en ce domaine une influence.
Un arrêt Dieter Krombach de la CJCE du 28 mars 2000 (nºC-7/98) a en effet
énoncé que « s'il n'appartient pas à la Cour de définir le contenu de l'ordre
public d'un État (de l'Union européenne), il lui incombe néanmoins de contrôler
les limites dans le cadre desquelles le juge d'un État (membre) peut avoir recours
à cette notion pour ne pas reconnaître une décision émanant d'une juridiction
d'un autre État membre »,
* en second lieu, l'exception d'ordre public n'a vocation à être mise en œuvre
qu'exceptionnellement, et ce, pour deux raisons. D'une part, on se trouve dans
le cadre européen, où les principes juridiques fondamentaux sont globalement
homogènes d'un pays à l'autre. D'autre part, pour qu'il y ait refus de reconnaissance
du jugement, il faut donc que la reconnaissance soit manifestement
contraire à l'ordre public de l'État membre requis. Une simple contrariété à
l'ordre public serait insuffisante. Ainsi que l'indique la Cour de justice, il faut être
en présence d'une violation manifeste d'une règle de droit considérée comme
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26. Pour une illustration, CJUE, 7 sept. 2023, aff. 590/21.
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