Mémentos - Droit des sûretés - 18e - 113

CHAPITRE 4 - Le gage
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l'opposabilité aux tiers (C. civ., art. 2337, al. 2). L'entiercement présente l'avantage de
permettre la pluralité de gages sur un même bien. Le tiers, alors commun, détiendra le
bien grevé pour le compte de tous les créanciers gagistes.
La réforme du 15 septembre 2021 a rétabli une possibilité qui était admise avant 2006,
mais que l'ordonnance du 23 mars avait malencontreusement supprimée (C. com., anc.
art. L. 521-2) : la dépossession peut porter sur les biens grevés, mais aussi sur le titre
représentatif de ceux-ci. C'est notamment le cas du connaissement, document constatant
le transport maritime, qui est un titre représentatif de la marchandise transportée.
Il est possible de penser que la dépossession demeure soumise aux conditions posées
avant l'ordonnance du 23 mars 2006. Elle doit être réelle, c'est-à-dire que le créancier
doit être véritablement en possession de la chose. Une dépossession fictive, par le biais
d'une tradition feinte, est inefficace.
La dépossession doit, en outre, être apparente afin de permettre aux tiers d'être renseignés
sur son existence. L'absence d'équivoque dans l'apparence de la dépossession est
laissée à l'appréciation des juges du fond, ce qui rend impossible toute tentative de
systématisation. Les tribunaux exigent une certaine « distance », géographique, matérielle
ou intellectuelle, entre le constituant et le créancier possesseur. Ainsi, par
exemple, le fait d'entreposer les biens grevés dans une enceinte fermée à clef a pu être
jugé insuffisant, en raison de la proximité de l'établissement du débiteur6
. De même, la
location d'un local ne suffit pas si ce dernier n'est pas clairement affecté au créancier.
Les biens grevés peuvent demeurer dans un entrepôt du débiteur, si celui-ci le loue,
même moyennant un loyer symbolique, au créancier. Mais l'apparence de la dépossession
suppose dans ce cas la remise des clefs et l'apposition de pancartes, de marques,
d'enseignes destinées à renseigner les tiers7
.
La dépossession doit enfin être permanente, c'est-à-dire qu'elle doit être continue et
durer jusqu'au terme du contrat. Le créancier qui renonce à la possession, même temporairement,
rend son gage inopposable aux tiers, sauf à procéder à une inscription, en
transformant le gage avec dépossession en gage sans dépossession. L'inconvénient
pour le créancier est que sa sûreté prendra rang au jour de l'inscription.
La condition de permanence doit toutefois être nuancée. D'une part, lorsque le bien
grevé est accidentellement détruit, le droit du créancier se reporte sur l'indemnité
d'assurance, par le biais d'une subrogation réelle (C. assur., art. L. 121-13). D'autre
part, si le bien grevé est perdu ou volé, le créancier peut agir en revendication, sur le
fondement de l'article 2276, alinéa 2, du Code civil. Enfin, le gage subsiste lorsque le
créancier a remis la chose au débiteur pour que celui-ci effectue des actes que lui seul
pouvait effectuer, afin d'empêcher la perte ou la dépréciation de la chose8
.
252. En revanche, l'admission en 2006 du gage sans dépossession a mis un terme à
une importante controverse doctrinale, qui portait sur le point de savoir si la dépossession
est une condition de validité du gage ou simplement d'une condition d'opposabilité
de la sûreté aux tiers. Les auteurs étaient partagés, certains voyant dans la dépossession
une condition de validité du contrat de gage, d'autres inclinant en faveur de la
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6. Cass. req., 28 mai 1910 : S. 1910, 1, p. 488.
7. Cass. com., 5 févr. 1979 : Bull. civ. IV, nº 49 - Douai, 5 mars 2009 : Juris-Data nº 2009-379137.
8. Cass. req., 11 avr. 1933 : S. 1933, 1, p. 248.
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