Les Carrés Rouge - L'essentiel des grands arrêts du droit administratif - 16e - 137

CHAPITRE 7 - La justice administrative
135
pour une juridiction d'affirmer sa compétence sur des organes qui peuvent avoir des fonctions juridiquement variées :
le président de la République exerce en effet une fonction politique, une fonction législative, et une fonction administrative.
C'est sur cette dernière que le juge administratif peut intervenir ; reste-t-il encore à l'identifier, souvent au cas
par cas, comme le fait le Conseil d'État en l'espèce.
Notons que le Conseil d'État aurait pu avoir une approche de type « organique », ce qui va d'ailleurs être le cas dans
une affaire qui sera jugée quelques mois plus tard sur des faits quasiment identiques (CE, ass., 19 oct. 1962, Canal,
Robin Godot; v. Chapitre 3). Mais quelle que soit l'approche consacrée dans ces deux affaires, il s'agissait pour le
Conseil d'État de trouver un raisonnement lui permettant de contrôler des actes du président de la République qu'il
estimait devoir l'être, car émanant d'une institution certes centrale dans la Constitution, mais exerçant en l'occurrence
des compétences typiques d'organes administratifs.
Proposition de plan
I. Le recours à l'article 16 de la Constitution constitutionnalise les circonstances exceptionnelles
A. Une procédure exprimant des relations entre pouvoirs publics constitutionnels
B. La décision de recourir à l'article 16 échappe à la juridiction administrative : acte de gouvernement
II. L'ouverture du contrôle juridictionnel aux mesures d'application de l'article 16
A. Une immunité juridictionnelle logique pour les actes de nature législative
B. Un contrôle juridictionnel des mesures de nature réglementaire
Pour aller plus loin
* T. confl., 2 févr. 1950, Radiodiffusion française : les actes de gouvernement ne sont susceptibles d'aucun recours
devant les tribunaux, tant administratifs que judiciaires (immunité juridictionnelle).
* CE, ass., 23 oct. 1964, d'Oriano : le Conseil d'État se réserve la possibilité de contrôler les mesures individuelles prises
sur le fondement de l'article 16 de la Constitution.
* CE, ass., 12 oct. 2018, SARL Super Coiffeur : le juge administratif ne peut pas apprécier la validité de réserves formulées
à l'égard d'un traité international (acte de gouvernement).
* CE, 21 janv. 2022, nº 460456 : toute nomination au Conseil constitutionnel constitue un acte de gouvernement.
* CE, 28 déc. 2022, Union syndicale professionnelle des policiers municipaux : le refus du gouvernement de
soumettre au Parlement un projet de loi généralisant l'armement des polices municipales est un acte de gouvernement
* CE, 27 janv. 2023, Association Action sécurité éthique républicaines (ASER) et autres : le refus implicite du
Premier ministre à une demande tendant à « la suspension sans délai de l'ensemble des autorisations préalables
d'exportation de matériels de guerre et matériels assimilés à destination de l'Arabie saoudite » constitue un acte de
gouvernement non détachable des relations internationales.
* CE, 24 févr. 2023, Associations « Vivre et agir en Maurienne » et « France nature environnement Savoie », et
autres : la déclaration conjointe du ministre délégué chargé des transports et du vice-ministre des infrastructures et des
transports de la République italienne ainsi que le refus du ministre « ne sont pas détachables de la conduite des relations
internationales de la France » et constitue donc un acte de gouvernement.
* CE, 24 juill. 2023, nº 473588 : les sanctions du bureau à l'encontre d'un parlementaire sont des actes de
gouvernement.
* CE, ass., 11 oct. 2023, Syndicat de la magistrature :l'acte par lequel le président du Sénat nomme une personnalité
qualifiée (une magistrate honoraire) membre du CSM ne constitue pas un acte de gouvernement.

Les Carrés Rouge - L'essentiel des grands arrêts du droit administratif - 16e

Table des matières de la publication Les Carrés Rouge - L'essentiel des grands arrêts du droit administratif - 16e