Les Carrés Rouge - L'essentiel des grands arrêts du droit des obligations - 6e - 182

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L'ESSENTIEL DES GRANDS ARRÊTS DU DROIT DES OBLIGATIONS
9 Cass. ass. plén., 10 nov. 1995, nº 94-13912 (Accidents
de la circulation - Faute inexcusable de la victime)
Vu l'article 3, alinéa 1er
, de la loi du 5juillet 1985 ;
Attendu que seule est inexcusable au sens de ce texte la faute volontaire d'une exceptionnelle gravité exposant sans raison
valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience ;
[...] Attendu que, pour retenir à la charge de M. X... une faute inexcusable et débouter ses ayants droit de leur demande,
l'arrêt retient que M. X... a traversé la chaussée et s'est maintenu sensiblement au milieu de cette voie afin d'arrêter un
automobiliste et de se faire prendre à son bord pour regagner son domicile, élément qui caractérise une démarche volontaire,
qu'il a ainsi agi, hors agglomération, sur une route dépourvue d'éclairage, à une heure de fréquentation importante,
habillé de sombre, de nuit et par temps pluvieux, élément qui caractérise l'exceptionnelle gravité de son comportement,
sans raison valable, par simple commodité, et s'est exposé par son maintien sur l'axe médian de la chaussée à un danger
dont il aurait dû avoir conscience, alors qu'il venait déjà précédemment d'éviter d'être renversé par un autocar, et que son
imprégnation alcoolique n'était pas telle qu'elle ait pu le priver de tout discernement ; (cassation)
■ Faits
Alors qu'il se trouve sur la chaussée d'un chemin départemental, M. X est heurté par une voiture automobile conduite
par M. Y, laquelle a été elle-même percutée à l'arrière par une camionnette appartenant à la société H. M. X ayant été
blessé, il assigne en réparation de son préjudice M. Y, qui appelle en garantie la société H. Suite au décès de M. X, la
procédure est reprise par ses héritiers. La cour d'appel refuse d'indemniser les héritiers de M. X au motif qu'il a
commis une faute inexcusable en traversant la chaussée et en se maintenant sensiblement au milieu de cette voie afin
d'arrêter un automobiliste et de se faire prendre à son bord pour regagner son domicile, hors agglomération, sur une
route dépourvue d'éclairage, à une heure de fréquentation importante, habillé de sombre, de nuit et par temps
pluvieux.
Les héritiers de M. X se pourvoient en cassation.
■ Portée
L'article 3, alinéa 1er
de la loi du 5 juillet 1985 limite les cas d'exonération de responsabilité en matière d'accidents de la
circulation. Si la faute de la victime ne peut en principe lui être opposée, il en va autrement d'une part lorsque cette
faute est inexcusable et a été la clause exclusive de l'accident et d'autre part lorsque la victime a volontairement
recherché le dommage. Si cette dernière hypothèse recouvre manifestement le suicide ou la tentative de suicide, la
première a suscité quelques difficultés d'interprétation.
La faute inexcusable n'ayant pas été définie par la loi, la jurisprudence a dû en dessiner les contours. Dans une série de
10 arrêts rendue le 20 juillet 1987 (par exemple nº86-16875 et 86-11275), la 2e
a défini la faute inexcusable au sens de l'article 3 de la loi nº 85-677 du 5 juillet 1985 comme « la faute volontaire
d'une exceptionnelle gravité exposant sans raison valable son auteur à un dommage dont il aurait dû avoir conscience
». La chambre criminelle a repris cette définition dans un arrêt du 4 novembre 1987.
L'arrêt rendu le 10 novembre 1995 en assemblée plénière ne fait que consacrer solennellement cette définition de la
faute inexcusable qui faisait déjà l'unanimité. « Il apparaît en définitive que la faute inexcusable n'est retenue qu'en
cas de dangerosité extrême, et lorsque la victime n'avait pas pu ne pas avoir la volonté d'en assumer le risque »
(I. Zakine, « Dix ans après la loi du 5juillet 1985 : l'implication d'un véhicule, la faute inexcusable du piéton », Bull. inf.
chambre civile de la Cour de cassation

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