Les Carrés Rouge - L'essentiel des grands arrêts du droit des obligations - 6e - 28

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L'ESSENTIEL DES GRANDS ARRÊTS DU DROIT DES OBLIGATIONS
3 Cass. 3e civ., 15 déc. 1993, nº 91-10199, Consorts Cruz
(Rétractationdelapromesseunilatérale de vente)
[...] Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de les débouter de cette demande, alors, selon le moyen, que, dans
une promesse de vente, l'obligation du promettant constitue une obligation de donner; qu'en rejetant la demande des
bénéficiaires en réalisation forcée de la vente au motif qu'il s'agit d'une obligation de faire, la cour d'appel a ainsi violé
les articles 1134 et 1589 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, ayant exactement retenu que tant que les bénéficiaires n'avaient pas déclaré acquérir,
l'obligation de la promettante ne constituait qu'une obligation de faire et que la levée d'option, postérieure à la rétractation
de la promettante, excluait toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d'acquérir (rejet).
■ Faits
Le 22 mai 1987, Mme
Y consent aux consorts Cruz une promesse de vente d'un immeuble, valable jusqu'au
1er septembre 1987. Le 26 mai 1987, Mme Y notifie aux bénéficiaires sa décision de ne plus vendre. Les consorts Cruz
lèvent l'option le 10 juin 1987 et assignent la promettante en réalisation forcée de la vente.
La cour d'appel déboute les consorts Cruz de leur demande au motif que la promesse constitue une obligation de
faire ; ils se pourvoient en cassation, soutenant que l'obligation du promettant est une obligation de donner susceptible
d'exécution forcée.
■ Portée
La question de la sanction de la rétractation de la promesse unilatérale a donné lieu à une vive controverse, auquel
l'arrêt Consorts Cruz semblait avoir mis fin mais qui ne cesse finalement d'aller de rebondissements en rebondissements.
Un promettant est en principe tenu de maintenir la promesse pendant le délai prévu lorsque l'acte en prévoit un. À la
différence de l'offre, la promesse est irrévocable pendant ce délai, même en cas de décès du promettant. Le bénéficiaire
n'est pas engagé avant la levée de l'option et il ne bénéficie pas non plus des droits que confère le contrat définitif.
S'il se décide à passer le contrat définitif, celui-ci se forme au moment de la levée de l'option. Mais quid de
l'engagement du promettant ? Quelle sanction appliquer en cas de rétractation de la promesse de sa part ?
Sous l'empire du droit antérieur à 2016, si l'on estime que le promettant est tenu d'une obligation de faire, celle-ci ne
peut se résoudre qu'en dommages-intérêts (C. civ., art. 1142 ancien) : cette analyse offre au bénéficiaire la seule possibilité
de la mise en œuvre de la responsabilité civile du promettant. Si l'on considère que le promettant est tenu d'une
obligation de donner, le promettant peut se voir condamné à l'exécution forcée de sa promesse. La Cour de cassation
opte par cet arrêt pour l'obligation de faire et la mise en œuvre de la responsabilité délictuelle du promettant, excluant
toute exécution forcée. La Cour de cassation précise que la rétractation du promettant fait obstacle à toute rencontre
des volontés, ce qui exclut toute formation du contrat promis.
L'arrêt Consorts Cruz provoque la critique quasi unanime de la doctrine. En effet, non seulement il eut été possible
d'envisager une exécution forcée, mais surtout la solution met à mal le principe de l'irrévocabilité unilatérale des
contrats, alors prévue à l'article 1134, alinéa 2 du Code civil.
Tenant compte de cette opposition, le nouvel article 1124 du Code civil issu de l'ordonnance du 10 février 2016
dispose désormais dans son 2e
alinéa que « La révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour
opter n'empêche pas la formation du contrat promis ». Il a pour vocation évidente de mettre fin à la jurisprudence

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