En poche - Grands principes du droit constitutionnel - 4e - 15

Vient ensuite une phase d'élaboration de la révision. Il est rare que la tâche
soit confiée à l'exécutif. Traditionnellement, les démocraties ont tendance
à confier cette mission au Parlement (comme dans la plupart des pays
d'Europe de l'est) ou à une assemblée spécialement élue pour l'occasion.
Enfin, l'adoption se fait par le peuple ou par ses représentants. Ainsi, le
peuple peut être directement mis à contribution (art. 89 de la Constitution
de 1958...) par la voie du référendum. L'assentiment populaire est
le procédé le plus démocratique, mais il est souvent supplanté par celui
de ses représentants. Il peut s'agir de l'assemblée spéciale déjà abordée
(parfois appelée Convention), ou du Parlement habituel. Dans ce dernier
cas, est souvent exigée une majorité plus forte que pour les lois habituelles
: dans le cadre de la Constitution de 1958, le choix de recourir au
vote des parlementaires revient ainsi au président de la République ; en
Allemagne, les deux chambres doivent voter la révision aux 2/3 de leurs
membres ; en Espagne, la procédure va même plus loin puisqu'après un
premier vote favorable, la chambre est dissoute et la suivante procède à
l'adoption définitive de la révision.
LES LIMITES DU POUVOIR CONSTITUANT DÉRIVÉ
Le pouvoir constituant dérivé n'est pas tout-puissant. Il existe un certain
nombre de limitations. Parfois, elles tiennent au respect d'un certain
délai, afin d'éviter qu'une majorité politique momentanée n'utilise la
révision à ses propres fins. D'autres tiennent aux circonstances de la
révision : suite à l'épisode malheureux de 1940 et des pleins-pouvoirs
accordés au Maréchal Pétain, la Constitution de 1958 prévoit, par exemple,
qu'aucune révision ne peut intervenir lorsqu'il est porté atteinte à l'intégrité
du territoire.
Enfin, il existe des limites touchant à la nature de la révision. Certains
domaines, par leur importance, échapperaient au champ d'action du pouvoir
constituant dérivé : c'est le principe de supra-constitutionnalité, qui
concerne principalement les droits fondamentaux. Par exemple, la loi fondamentale
allemande interdit toute révision portant sur la forme de l'État
(fédéral) ou les droits fondamentaux : on parle alors de clause d'éternité
(art. 79, al. 3). En France, l'article 89 alinéa 5 de la Constitution de 1958
dispose que « La forme républicaine du Gouvernement ne peut faire l'objet
d'une révision ».
À noter
La théorie de la supra-constitutionnalité ne fait pas l'unanimité. Si certaines
cours constitutionnelles l'admettent et acceptent de contrôler une loi constitutionnelle
au regard de ces principes (Allemagne, donc, mais également
Autriche ou Italie), le concept est très minoritaire en France. Dominique
Chagnollaud de Sabouret explique ainsi qu'une telle reconnaissance
reviendrait « à admettre purement et simplement un gouvernement des
juges ». En effet, le juge constitutionnel aurait alors le monopole du pouvoir
constituant.
Le pouvoir constituant
En poche - Grands principes du droit constitutionnel - 4e

Table des matières de la publication En poche - Grands principes du droit constitutionnel - 4e
