Fonction publique - Concours-Police-Officier-et-Commissaire 2025 - 5e - 282

Toutefois, la portée très générale de certains éléments du « bloc de constitutionnalité », tels que les articles de
la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, est de nature à offrir une importante marge de manœuvre
au Conseil constitutionnel, dans le cadre de ce contrôle. Cette situation peut nourrir des inquiétudes, quant
à une éventuelle ingérence dans les choix du législateur, s'agissant d'une matière dominée par le principe
de légalité. Le principe donne en effet traditionnellement une importance considérable à l'organe chargé
d'édicter le texte d'incrimination ou de pénalité, en mettant l'accent sur les garanties prodiguées par cet
organe. L'intervention du Conseil constitutionnel pourrait à cet égard être perçue comme un facteur de
complexité ou de désordre, dans le domaine sensible de la politique criminelle où la cohérence s'impose.
À ces incertitudes s'ajoute celle relative à la notion de « matière pénale », généralement comprise comme
englobant le droit pénal substantiel et la procédure pénale. Ce concept est aussi mis en avant par certains
auteurs comme intégrant, au-delà du droit pénal, toutes formes de sanctions (disciplinaires, fiscales, etc.)
présentant le caractère d'une « punition », selon une approche développée dans la jurisprudence de la
Cour européenne des droits de l'homme. Un rapprochement est parfois envisagé, sous ce rapport, avec
certaines positions du Conseil constitutionnel relatives aux mécanismes de sanction, ou encore aux mesures
de sûreté. Le Conseil constitutionnel a en effet jugé que les garanties du droit pénal s'appliquent à toute
sanction ayant le caractère d'une punition, même prononcée par une autorité de nature non judiciaire
(Cons. const., déc. du 30 décembre 1982). Ainsi, que faut-il penser de la constitutionnalisation, doit-elle
englober la « matière pénale » au sens élargi, compte tenu des incertitudes qui subsistent dans ce domaine ?
Plus généralement, si la constitutionnalisation de la matière pénale peut sembler à de nombreux égards
pourvoyeuse de légitimité et de garanties fondamentales, dans quelle mesure est-elle susceptible de
bousculer le principe de légalité et d'introduire une complexité excessive dans un domaine sensible ?
La constitutionnalisation de la matière pénale s'élabore sur des principes très variés et l'intervention du Conseil
constitutionnel peut emprunter des voies diverses surtout depuis l'introduction de la question prioritaire
de constitutionnalité par la réforme du 23 juillet 2008. L'empire croissant du Conseil constitutionnel sur
la matière pénale engendre en tout état de cause une importante controverse entre ses partisans et ses
détracteurs. Nous envisagerons donc successivement la nature protéiforme (I) et controversée (II) de la
constitutionnalisation de la matière pénale.
I. Une constitutionnalisation protéiforme
Le caractère protéiforme de la constitutionnalisation se manifeste tant par la diversité des principes invoqués
(A) que par la diversité des modalités d'action du Conseil constitutionnel (B).
A. LA DIVERSITÉ DES PRINCIPES INVOQUÉS
C'est notamment en se fondant sur la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, incluse dans le « bloc
de constitutionnalité », que le Conseil constitutionnel a reconnu la valeur constitutionnelle du principe de
légalité. Ce fut le cas s'agissant de l'exigence de clarté et de précision de la loi pénale : ainsi, le Conseil
constitutionnel a censuré le concept de « malversation » dans sa décision du 18 janvier 1985. Le Conseil
constitutionnel a également souligné la valeur constitutionnelle des corollaires du principe de légalité,
tels que le principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère (Cons. const., déc. Sécurité et Liberté
des 19 et 20 janvier 1981). Il a, en outre, affirmé la valeur constitutionnelle du principe de rétroactivité
de la loi plus douce (ou rétroactivité in mitius) en s'adossant au principe de nécessité des peines énoncé
à l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 (Cons. const., déc.
des 19 et 20 janvier 1981). Le principe de nécessité des peines a également donné lieu à d'importantes
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