Revue - Bulletin Joly Sociétés septembre 2017 - Actualité du registre du commerce - 12

Chronique

sonne physique n'est pas le dirigeant de droit de la société B
faisant l'objet de la procédure collective. L'article L. 63110 du Code de commerce interdit, sous peine de nullité, à
compter du jugement d'ouverture, aux dirigeants de droit ou
de fait d'une société en redressement judiciaire de céder, sans
autorisation du tribunal, les parts sociales qu'ils détiennent,
directement ou indirectement dans le capital de la société.
Sur la base de cette disposition, le greffier va refuser le dépôt
de l'acte de cession de parts sociales, qui n'avait fait l'objet
d'aucune autorisation judiciaire, et sa position sera confirmée
par la cour d'appel saisie d'un recours contre la décision du
greffier. La décision rapportée casse l'arrêt de la cour d'appel pour défaut de réponse aux conclusions de l'appelante,
laquelle soutenait que la détermination d'une direction de
fait d'une société échappe à la compétence du greffier et partant du juge commis. En effet, le représentant légal des sociétés cédante et cessionnaire n'était pas le dirigeant de droit de
la société en redressement judiciaire, si bien que le rejet du
greffier ne pouvait qu'être fondé sur une opération de qualification de celui-ci en dirigeant de fait. Or, selon une jurisprudence constante, la qualification d'un personne physique
en dirigeant de fait relève de l'appréciation souveraine des
juges du fond 23, lesquels doivent adopter des motifs propres
à caractériser, en fait, la direction de la société pouvant être
contrôlés par la Cour de cassation 24.
Il s'avère que la Cour de cassation a déjà jugé dans le passé
que le juge commis à la surveillance du RCS « n'est investi
d'aucun pouvoir d'appréciation au fond quant à la validité
des actes qui lui sont remis » 25. Dans l'espèce qui était soumise à la Cour, un litige était pendant au fond quant à la
requalification d'un acte de location-gérance en bail commercial et le juge commis avait néanmoins ordonné la radiation
des locataires-gérants en se fondant sur la validité apparente
du contrat. Le juge commis, constatant qu'un litige était pendant devant le tribunal de commerce, ne pouvait effectivement statuer sur la demande d'injonction de radiation sans
excéder ses pouvoirs et devait attendre que le litige soit vidé
au fond.
Dans l'espèce commentée, nous avons une situation qui est
semblable. Ainsi le juge commis, qui n'est pas le juge du fond
des actes et situations juridiques, ne pouvait refuser le dépôt
de l'acte de cession de parts en requalifiant le cédant en dirigeant de fait de la société en redressement judiciaire. L'intérêt
de l'arrêt rapporté réside donc essentiellement dans un rappel implicite de la nature de la juridiction spéciale du juge
commis, qui n'est pas celle d'un juge du fond. Cela ne veut
aucunement dire qu'il ne procède jamais à un contrôle de
légalité ou de régularité des actes déposés au RCS, lorsque la
loi ou le règlement le prescrit. C'est le cas lorsque le greffier
23 Cass. com., 6 mars 1990, n° 88-20382 et déjà Cass. com., 2 févr. 1982,
n° 80-14773 : Bull. civ. IV, n° 40.
24 Cass. com., 28 janv. 1997, n° 94-18867 ; Cass. com., 16 mars 1999, n° 95-17420 :
Bull. civ. IV, n° 64.
25 Cass. com., 29 avr. 1997, n° 94-21616 : Bull. civ. IV, n° 115 ; RTD com. 1998,
p. 132, obs. Derruppé J. V. Bahans J.-M., « Publicité des sociétés », JCl. Traité des
sociétés, fasc. 27-40, § 80.

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dispose d'un tel pouvoir, par exemple pour contrôler les actes
constitutifs et modificatifs des sociétés commerciales et qu'il
est saisi d'un recours contre la décision du greffier (C. com.,
art. L. 210-7, C. com., art. R. 123-94 et C. com., art. R. 12395). Ce contrôle n'est pas seulement formel, puisque qu'il
porte notamment sur les causes de nullité du contrat de
société, mais il n'est pas celui d'un juge du fond pour autant.
Le greffier, et partant le juge commis, ne peuvent en effet
jamais requalifier un acte ou l'annuler. Leur pouvoir est limité
à l'acceptation ou au rejet d'un dépôt d'acte ou d'une inscription au registre.
J.-M. B.

Obligation de dépôt des comptes annuels :
absence de seuil minimum d'activité
Dans sa décision, la cour d'appel de Colmar rappelle que le
dépôt des comptes annuels, en annexe du RCS, s'impose aux
entreprises quel que soit leur niveau d'activité (CA Colmar,
27 févr. 2017, n° 16/05881).
Dans le cas d'espèce, le représentant légal de la société a été
enjoint sous astreinte de déposer ses comptes sociaux par
ordonnance du président du tribunal, conformément aux dispositions des articles L. 611-2 et R. 611-13 du Code de commerce relatives à la prévention des difficultés des entreprises.
Cette injonction n'étant pas suivie d'effet, le président a
liquidé l'astreinte par une seconde ordonnance. La société a
alors interjeté appel arguant que le non-dépôt de ses comptes
était dû aux difficultés rencontrées par le dirigeant et au fait
que l'entreprise n'avait plus réellement d'activité.
La cour d'appel a confirmé la décision en estimant que les
difficultés évoquées ne constituent pas un obstacle insurmontable au dépôt des documents comptables de la société, documents qui doivent être établis quelle que soit l'importance de
l'activité de la société.
Il convient d'approuver cette décision de la cour d'appel
de Colmar en rappelant que la publicité par le dépôt des
comptes sociaux au RCS permet d'assurer la transparence de
la vie des affaires puisque les comptes sont l'image fidèle du
patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise (C. com., art. L. 123-14). Il convient également d'indiquer, au regard des arguments soulevés devant la cour d'appel
par le dirigeant social, que dans un objectif de simplification
des formalités, les petites entreprises peuvent adopter une
présentation simplifiée de leurs comptes annuels et que les
micro-entreprises sont dispensées de l'obligation d'établir une
annexe aux comptes, sous réserve que leur activité ne consiste
pas à gérer des titres de participation et des valeurs mobilières.
Notons, par ailleurs, qu'une société qui interrompt ou cesse
ses activités économiques, sans qu'il soit pour autant décidé
de la dissoudre et de procéder à la liquidation de son patrimoine, doit nécessairement établir des comptes annuels.
L'administration interne de la société ne doit pas en effet subir
de modifications et les assemblées générales sont maintenues
dans l'intérêt des associés ou actionnaires de la société com-

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Joly

Sociétés

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Septembre

2017



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