Droit et Société - Tome 35 - Les impensés du droit administratif - 118

Les impensés du droit adminstratif des territoires
Tel est le cas du pôle métropolitain, prévu aux articles L. 5731-1 et suivants du
CGCT depuis la loi du 16 décembre 2010, défini comme un établissement public
constitué par accord entre des EPCI à fiscalité propre « en vue d'actions d'intérêt
métropolitain, afin de promouvoir un modèle d'aménagement, de développement
durable et de solidarité territoriale » 53. En principe, l'un des EPCI du pôle
métropolitain doit compter plus de 100 000 habitants et a vocation à faire coopérer
des territoires de densité différente. Le pôle d'équilibre territorial et rural
54, issu de la loi MAPTAM, constitue quant à lui un outil de coopération entre
EPCI sur les territoires situés hors métropoles qui vise particulièrement à lisser
les différences entre territoires ruraux et villes petites et moyennes. Le « projet
de territoire » élaboré en son sein définit « les conditions du développement
économique, écologique, culturel et social » dans le cadre de son périmètre 55.
Pôles métropolitains et pôles d'équilibre territorial et rural sont soumis aux
règles applicables aux syndicats mixtes. S'ils peuvent, dans une certaine mesure,
atténuer les inégalités entre territoires relevant d'EPCI différents, ils présentent
l'inconvénient d'ajouter des structures aux EPCI déjà nombreux, à la différence
des dispositifs relevant d'une coopération conventionnelle.
On peut citer pour exemple d'une telle coopération le Pacte État-métropoles
signé le 6 juillet 2016 avec les 15 métropoles de l'époque, qui était censé les
aider à assumer leur rôle de moteur du développement territorial. Un volet de
ce pacte, appelé « contrat de coopération métropolitaine », a pour objet de
« renforcer les coopérations entre les métropoles et leurs territoires avoisinants
». Mais, dans son rapport de 2017, la Cour des comptes notait que
« l'effet réel d'irrigation par les métropoles des territoires avoisinants n'est pas
avéré. (...) L'association Villes de France dénonce ainsi l'absence de vision
stratégique de l'État pour les 600 villes de taille intermédiaire, qualifiées désormais
" d'espaces interstitiels'' ». La Cour des comptes reconnaissait ainsi
qu'il n'est « pas acquis que l'affirmation des métropoles ait des retombées positives
sur les territoires proches » 56, exprimant quelques doutes quant à la
« théorie du ruissellement ».
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Dans une recherche récente, des économistes ont mis en avant le « creusement
des inégalités sociospatiales » 57. Cette réalité, dont le mouvement des
« gilets jaunes » constitue une manifestation, est liée en partie aux grandes intercommunalités
- quoiqu'il existe une grande variété de situations métropolitaines
58 - mais surtout au désengagement progressif de l'État, lequel a, pendant
53. Article L. 5731-1 du CGCT.
54. Il est régi par les articles L. 5741-1 et suivants du CGCT.
55. Article L. 5741-2 du CGCT.
56. Cour des comptes, Rapport 2017, p. 114.
57. Déborah GALIMBERTI, Gilles PINSON et Jefferey SELLERS, art. précit.
58. Ibid., p. 91. Les auteurs de l'étude montrent par exemple que des inégalités importantes existent
dans les métropoles de Paris et de Lyon, alors que la métropole de Nantes connaît peu de
disparités.
Recherches et travaux, vol. 35/2022
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