Revue - Droit & Société N°111-2022 - 30

I. LIZZOLA
accusés, de la présence d'une urgence justifiée par l'existence de situations portant
préjudice aux droits fondamentaux.
Dans l'affaire de l'imam, les différentes instances de la justice administrative considèrent
que la « situation d'urgence imminente » supposée fonder le recours en référé-liberté
n'est pas « justifiée », la mesure d'assignation à résidence ne portant pas
une « atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale » 25. Dans la
deuxième affaire, l'urgence fondée sur l'atteinte présumée à la vie privée et familiale
de l'agent d'escale est accueillie dans un premier temps puis écartée, suite à la
communication de la note blanche, au motif que la décision préfectorale serait
« nécessaire à la sécurité nationale [et] à la sûreté publique » 26.
Encadré 1
Chronologie de l'affaire de l'imam faisant l'objet d'un arrêté d'expulsion
du territoire national et assigné à résidence
Suite à une enquête de surveillance s'étant déroulée à plusieurs reprises et sur des
temps courts entre 2010 et 2013, le 23 juin 2014, l'intéressé, imam d'origine égyptienne
résidant régulièrement en France, est convoqué devant une commission préfectorale
qui émet un avis favorable à son expulsion du territoire national 27.
En réponse à l'avis de la commission préfectorale, le 11 juillet, la commission
d'expulsion du tribunal de grande instance se dit défavorable à l'expulsion. En dépit de
cela, le 22 décembre, le ministère de l'Intérieur communique à l'intéressé un arrêté
d'expulsion du territoire national.
Dans le cadre de la procédure d'expulsion, l'intéressé fait l'objet d'un arrêté ministériel
d'assignation à résidence qui lui est communiqué le 22 juillet, puis modifié le
14 septembre et le 4 novembre.
Le 31 août, l'intéressé dépose une demande d'asile auprès de l'Office français de protection
des réfugiés et des apatrides (OFPRA), qui refuse de lui octroyer le statut de réfugié.
En octobre 2015, il présente deux recours : le premier devant la Cour nationale du
droit d'asile (CNDA), pour demander l'annulation de la décision de l'OFPRA ; le deuxième
devant le juge du référé-liberté du tribunal administratif (TA), demandant la suspension
de l'arrêté ministériel d'assignation à résidence.
Dans le cadre du premier recours, en novembre 2015, la CNDA prend la décision de
suspendre l'exécution de l'arrêté d'expulsion au motif que le pays de destination
(l'Égypte) serait à « risque ». Suite à cette décision, le ministère de l'Intérieur s'engage à
ne pas expulser l'intéressé. En parallèle, la requête présentée devant le TA est rejetée
par ordonnance du juge du référé-liberté.
La procédure administrative continue en 2016. Notre enquête de terrain se met alors
en place 28. Une nouvelle requête est enregistrée par le TA le 19 février et une audience
publique est fixée pour la fin du mois.
.../...
25. Ordonnance du TA, 5 mars 2016.
26. Ordonnance du TA, 3 février 2017.
27. L'individu a été jugé expulsable sur la base d'une note blanche produite par les services de renseignement
témoignant, d'après la préfecture, d'un « discours antisémite obsessionnel, pouvant être perçu
comme une véritable incitation à la haine et à la violence contre les juifs » par les fidèles assistant aux
prêches de l'imam. Cette conclusion, formulée dans la note blanche, constitue l'unique élément factuel
d'appui aux procédures judiciaires.
28. Au cours de l'activité de terrain, nous avons suivi la procédure devant les instances de la justice administrative.
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 Droit et Société 111/2022
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