Droit et Société - Volume 37 - Vivre en copropriété - 110

Entre copropriété et association
Un projet d'habitat participatif dans le sud de la France
Mais le travail dont la lourdeur est dénoncée n'est pas seulement celui que
l'on place habituellement du côté du « sale boulot 34 ». Les tâches dévolues au
conseil syndical sont décrites comme particulièrement ardues. Son président en
témoigne lors de l'assemblée du syndicat : « Entre les réunions [toutes les trois
semaines] y avait quand même beaucoup de boulot. »
La lourdeur de la fonction de conseiller amène à ne pas vouloir l'exercer
trop longtemps :
« Pascale : Il faudrait que ça tourne aussi comme ça, sauf que bien sûr on est
moins nombreux hein, puisque les personnes qui sont en location ne font pas...
ne... n'intègrent pas le conseil syndical juridiquement, mais il faut y penser,
parce que si y a pas de turnover comme ça, heu, et bah ça veut dire quoi ? [...]
Pascale : qu'il faudra faire appel à... voilà [...]
Sylviane : un syndic extérieur qu'il faudra payer
Pascale : voilà c'est ça, on peut... on s'épuise [...] vous le savez, c'est du boulot
hein, c'est du boulot. »
La division des tâches et leur répartition font l'objet d'un important « travail
d'organisation 35 » qui vise à assurer l'égale implication de tous.
Cette organisation, que certains jugent excessivement formalisée, remplit
une fonction. Toutes les tâches doivent « tourner » et chacun doit y prendre
part, au nom du principe de répartition équitable de la charge de travail : « Ce
qui est imposé, et encore, c'est pas écrit quelque part, c'est on fait partie chacun
au moins d'un groupe de travail, on sort les poubelles, on fait le ménage, ça
c'est des incontournables » observe Pascale 36. Franck considère la répartition
du travail pour l'immeuble entre un grand nombre de personnes comme l'un
des bénéfices essentiels de l'association : « Nous, on a l'impression de faire
beaucoup pour la copropriété dans le conseil syndical, mais du coup implicitement
on est déchargé d'être très actifs côté association. Parce qu'on sait que ça
prend du temps. Et tous les autres qui sont pas dans le conseil syndical, qui
dans une copro classique, bah ils feraient rien à part venir à l'AG une fois par
an, bah eux ils sont super actifs dans l'association. »
L'organisation du travail vient garantir la conformité au principe participatif.
L'égalité est revendiquée, la coopération mise en avant, au sein du CSC par
exemple. Pascale précise en plénière qu'elle n'est pas seule à s'occuper des
comptes du syndicat : « Sylvie et Olivier s'occupent aussi de tout ça, tous les
34. Everett C. HUGHES, Le regard sociologique. Essais choisis, EHESS, Paris, coll. « Recherches
d'histoire et de sciences sociales », 1997.
35. Marie-Anne DUJARIER, « Chapitre 2. Travail et organisation : quelques définitions », dans
Marie-Anne DUJARIER , L'idéal au travail, PUF, Paris, 2006, p. 43-54.
36. Pourtant, cette rotation ne semble pas totalement effective. Pour certaines tâches ingrates
telles que le ménage, l'insuffisant renouvellement est dénoncé par certains habitants, même si
tous doivent y participer à tour de rôle.
Recherches et travaux, vol. 37/2023
110

Droit et Société - Volume 37 - Vivre en copropriété

Table des matières de la publication Droit et Société - Volume 37 - Vivre en copropriété