Droit et Société - Volume 37 - Vivre en copropriété - 19

Marie-Pierre LEFEUVRE, Gaël CHANTEPIE, Camille FRANÇOIS,
Flavia LEONE, Romain MELOT, Emilia SCHIJMAN
des copropriétaires à la gestion de l'immeuble n'est pas un enjeu de débat. Sur
le plan international, il en est autrement (cf. chapitre I, infra). Ce qui nous invite
à questionner l'évidence et à nous intéresser au travail effectué par les copropriétaires,
ici et ailleurs.
Le travail pour l'immeuble dans les copropriétés « populaires
» et « moyennes »
Plutôt que de nous focaliser sur les deux extrémités de la hiérarchie sociale
et urbaine, c'est-à-dire sur ces deux pôles spectaculaires, mais minoritaires que
constituent les gated communities de beaux-quartiers et les « copropriétés dégradées
» (qui focalisent davantage le regard des chercheurs français 46), nous
sommes allés à la recherche de copropriétés dominées par des catégories susceptibles
de s'investir dans le travail pour l'immeuble, dans des espaces populaires
ou « moyens mélangés 47 », « espaces [non] prestigieux 48 », éventuellement
en cours de gentrification 49. Des recherches ont montré combien certains
espaces sont le produit du travail de leurs habitants, travail de gentrification 50
ou de production d'un espace populaire 51.
Nous avons exclu de nos investigations les espaces résidentiels marqués par
une forte discontinuité entre sphère privée (domaine exclusif de famille et des
proches) et domaine public 52 ; les immeubles dont le prestige repose sur la pro46.
Citons notamment les thèses de Sylvaine LE GARREC (La démolition d'un grand ensemble en
copropriété : une réponse urbaine à un problème de gestion ? La copropriété des Bosquets à
Montfermeil (93), thèse de doctorat en urbanisme, université Paris Est, 2010) ; de Johanna
LEES (Ethnographier la précarité énergétique : au-delà de l'action publique, des mises à
l'épreuve de l'habiter, thèse de doctorat en géographie, EHESS Marseille, 2014) ; d'Eva SIMON
(L'action publique locale sur les copropriétés dégradées : des politiques publiques différenciées
et inégales à Lyon, Marseille et Grenoble, thèse de doctorat en science politique, Université
Grenoble Alpes, 2017).
47. Edmond PRETECEILLE, « La division sociale de l'espace francilien », rapport de recherche,
OCS, CNRS, Science Po Paris, 2003, https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00112699/
48. Loraine BOZOULS, « " Et si le luxe c'était l'espace ? " Le rôle de l'espace du logement dans la
socialisation des classes supérieures du pôle privé », dans Sociétés contemporaines, vol. 115,
n° 3, 2019, p. 151-179.
49. Confrontés au terrain, les objectifs de l'enquête ont dû être ajustés. D'abord parce qu'aucune
donnée de permet de connaître a priori les caractéristiques socioéconomiques d'une copropriété.
Nous avons eu recours à des informateurs pour sélectionner des cas correspondant aux
critères établis par hypothèse (agence locale de l'énergie, collectivité locale). La localisation
fut aussi prise en compte (et les données de l'Insee au niveau de l'Iris). De l'enquête par questionnaire,
seul moyen d'établir la coïncidence entre nos cas d'étude et l'objectif visé, se dégage
une certaine hétérogénéité, mais qui n'invalide notre sélection.
50. Anaïs COLLET, « Les " gentrifieurs " du Bas Montreuil : vie résidentielle et vie professionnelle
», dans Espaces et sociétés, 2008, 1, n° 132-133, p. 125-141.
51. Rosa BONHEUR, La ville vue d'en bas. Travail et production de l'espace populaire, Éditions
Amsterdam, Paris, 2019.
52. Béatrix LE WITA, Ni vue ni connue. Approche ethnographique de la culture bourgeoise, Éditions
de la MSH, Paris,1988.
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Recherches et travaux, vol. 37/2023

https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00112699/

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